Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

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pascale80
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par pascale80 » mar. avr. 22, 2025 11:29 am

Attention vous êtes surveillé.... :mrgreen: :mrgreen:
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ClaraBistouille
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par ClaraBistouille » mar. avr. 22, 2025 8:46 pm

Mon dieu ! Tu m'as percée à jour Schaltzm' âne ! ^^ ^^ ^^ ^^ ^^

Point n'est besoin de parler, en effet...
(Tu devrais suivre mon exemple... Le silence est bien plus reposant que ta diarrhée verbale ^^)
Et tu vois, je le confirme : quelques gribouillis suffisent... ^^

Ta nouvelle amie Lara Turelle ^^
^^ ^^ ^^ ^^ ^^ ^^ ^^ ^^ ^^ ^^ ^^
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schaltzmann
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par schaltzmann » mer. avr. 23, 2025 7:13 pm

Ce récit est une histoire, une fiction. Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d'une pure coïncidence.

JOUR 13 – Bloc C, Cellule 21
La Mise au Pas

Il faut croire que l’imagination libre est une hérésie.

Depuis ce matin, je suis officiellement persona non grata dans les ateliers. La sentence n’a pas été prononcée à voix haute. Elle est apparue comme une note de service, comme si on m'expliquait que Skype allait disparaître, écrite en tout petit, mais qui hurle dans ma cellule :

“Participation suspendue jusqu’à nouvel ordre. Raison : contenu inadapté.”

Ma case est vide. Rayée. Pas d’atelier. Pas de sortie. Pas même la promenade. La majorité de mes camarades, eux, ont eu droit aujourd’hui à un programme allégé : film humaniste en salle commune — sans doute la Liste de Schindler ou une daube dans le genre — promenade prolongée sous surveillance modérée, et pour les meilleurs d’entre eux, une “discussion libre” autour des valeurs citoyennes.

Un luxe. Que je ne mérite pas. Moi, je suis puni. La faute ? Le conte. Le Chevalier. Ce foutu Chevalier.

J’ai appris, par des murmures, des regards fuyants et une note griffonnée dans un dossier qui traînait, que le directeur avait convoqué une cellule de crise après sa crise de nerfs d’hier. Le verdict ? Prévisible :

« L’histoire que vous avez écrite promeut un système de valeurs déviant. Le Chevalier que vous présentez comme un héros est, selon notre lecture, un fauteur de trouble. Un destructeur d’harmonie. Un opposant à la stabilité sociale. Un danger. »

Voilà. Dans mon histoire, j’ai osé inverser les rôles. J’ai fait des sorcières les gardiennes d’un ordre étouffant. Et j’ai offert à un homme libre le rôle du sauveur.

On me reproche : l’ironie déplacée, le deuxième degré toxique, l’ambiguïté subversive, et surtout : l’absence d’un message clair, balisé, conforme.

Alors on m’a imposé le silence. Et dans ce silence, on m’a remis une consigne imprimée sur un papier recyclé :

“Réécrivez le conte. En respectant les équilibres moraux définis par notre cadre éducatif.
Le Chevalier devra incarner le danger. Les fées, la sagesse. Le Mage, la régulation.”


Je n’ai pas encore touché le crayon. Je l’ai regardé longtemps. Mais non. Pas encore. Je ne peux pas. En attendant, on m’inflige La Chanteuse.

Elle tourne dans le couloir depuis deux heures. Une créature vocale échappée d’un opéra de cauchemar. Elle chante — ou plutôt, elle vocifère — un morceau sans queue ni tête. Un mélange de vocalises dissonantes et de syllabes inventées. C’est comme si on avait enregistré la fin du monde, puis mis l’extrait en boucle, juste pour moi. On m’a glissé, à voix basse, presque compatissante :

“Tant que vous ne rendrez pas un conte conforme… elle reviendra. Chaque jour.”

Je n’ai même pas droit à des bouchons d’oreilles. C’est le tarif spécial pour ceux qui s’obstinent.

Pendant ce temps-là, dans la salle commune, on célèbre un autre conte. Un texte rendu par un détenu modèle. Un type dont je ne connais même pas le prénom. Il est ici depuis quelques jours seulement, mais il est déjà corrigé. Le genre à dire bonjour en regardant ses pieds, à prendre des notes pendant les méditations collectives, et à remercier après chaque consigne reçue comme une faveur.

Son conte, lui, a été validé. Encadré. Projeté. Ils l’ont appelé “Histoire conforme.”

Et on m’en a donné une copie. Officiellement, pour que je m’en imprègne. Pour que je comprenne pourquoi celui-ci est autorisé. Et pour que je le compare à l’odieuse histoire que j’ai remise la veille, pleine de désobéissance narrative, d’ambiguïtés dangereuses, et de chevaliers qu’on ne peut pas contrôler.

Je ne résiste pas à l’envie de vous la partager, et je la lis, en même temps que vous :

L’Impertinent de la Colline
[Conte conforme aux Valeurs du Centre]

Il était une fois un village paisible, nommé Sucre-Puits, où les rires étaient doux, les gestes mesurés, et les mots toujours choisis avec soin.

Au centre du village, trônait un puits, dans lequel on puisait chaque matin des seaux entiers de sucre. Pas pour les gâteaux. Non. Pour sucrer les discours, les opinions, les émotions. Pour adoucir les âmes, étouffer les colères, napper les différences. Chacun se servait. Et chacun remerciait.

Dans ce lieu merveilleux, vivaient de bienveillantes fées aux ailes légères et aux cœurs débordants d’amour. Et parmi toutes ces fées rayonnantes, brillait Agnoline.

Sa robe était toujours la plus lisse, ses ailes les plus nacrées, et son sourire… ah, son sourire ! Il était comme une caresse sucrée sur une joue bien lavée.

Agnoline était aimée de tous. Car elle savait tout ce qu’il fallait savoir pour que le monde reste joli, ordonné, doux et surtout, sans vague. C’était elle qui, d’une voix douce comme un bonbon fondant, définissait ce qui se disait… et ce qui ne se disait pas. Elle savait parfaitement où le rire devenait moquerie, où les mots glissaient vers l’irrespect, où le second degré devenait dangereux.

Et parfois même, quand vraiment le cas semblait extrême… un vilain mot sortait de sa propre bouche. Oui. De la bouche d’Agnoline. Un mot très vilain, un mot qu’on ne dit jamais à Sucre-Puits, mais qu’elle lançait comme une flèche en sucre amer… pour mieux enseigner la leçon.

Et juste après, d’un petit tour de baguette magique, paf ! Elle disparaissait dans un nuage de sucre collant et parfumé, un tourbillon de rose et de vanille, le temps de se calmer.

Parfois, elle revenait au bout de quelques minutes. D’autres fois, il fallait attendre plusieurs heures. Mais toujours, elle revenait apaisée, le sourire réparé, la voix plus douce encore. Et tout le monde applaudissait, parce qu’à Sucre-Puits, on comprenait que même une fée pouvait trébucher… mais jamais tomber.

Et juste après elle, dans une maisonnette ronde aux volets framboise et aux rideaux en dentelle de sucre, vivait une autre fée très, très spéciale : Crayoline la Délicate.

Elle était jolie comme un dessin de maternelle, toujours propre, toujours douce, toujours d’accord. Crayoline ne parlait jamais trop fort. Elle ne haussait pas le ton. Elle ne disait jamais non. Elle dessinait. Avec ses crayons enchantés, elle traçait dans l’air de petits signes adorables : des spirales bienveillantes, des gouttes de miel, et parfois même, de petits chapeaux pour les pensées tristes.

Son pouvoir était magnifique. Et très utile. Elle savait éteindre les rires trop incongrus ou trop marqués du ton de l’ironie avec un simple jeu de mot bien placé. Ses calembours étaient merveilleux et comparables à nul autre. Quand elle entendait une moquerie pointer le bout de son nez, elle tournoyait doucement, levait ses bras poudrés et lançait des sorts très spéciaux :

— « Par la clarté de Claire Voyance, que tout devienne bien sage ! »
— « Que Paul Émique transforme ce rire piquant en un souffle tout doux ! »
— « Et qu’Ella Boration emporte loin les idées trop farfelues ! »

Et pouf ! Les blagues trop osées disparaissaient. Les rires devenaient des chuchotements. Les enfants applaudissaient bien fort, parce qu’ils trouvaient ça vraiment trop rigolo. Tout le monde le savait : les sorts de Crayoline étaient puissants. Alors, pour rester dans ses bonnes grâces, il valait mieux la féliciter souvent… et lui dire, encore et encore, que sa magie était la plus belle du monde.

Mais parfois, un petit grain de sel tombait dans le pot de confiture. Un bruit. Une rumeur. Une voix.

Et quand cela arrivait, les fées couraient chercher Bidulias le Juste.

Il vivait dans une maisonnette ronde au toit en mousse, près du vieux tronc penché que l’on appelait l’Arbre de l’Ordre. Là-bas, il méditait longuement, et les mésanges, comme si elles comprenaient l’importance du moment, se posaient tout autour de lui, en silence.

Bidulias, c’était le guide. Le mentor. Le seul à savoir où poser les pieds quand les ailes ne suffisent plus. Sans lui, les fées ne savaient plus distinguer le Nord du Sud, le blanc du noir, le Bien du Mal, ni même le sarcasme du compliment trop franc.

C’est lui qui leur montrait le sens du vent, et la meilleure direction pour tourner leurs danses. Et les fées l’aimaient fort. Elles l’entouraient quand il faisait froid, formant une écharpe vivante de robes et d’ailes qui sentaient la lavande. Et quand il faisait trop chaud, elles s’alignaient autour de lui et battaient doucement des ailes, pour lui fabriquer un vent de paix et de fraîcheur.

Quand il parlait, elles s’inclinaient. Quand il levait un doigt, elles se taisaient. Et quand il fronçait les sourcils, elles arrêtaient tout… même de respirer, ou presque.

Car Bidulias savait. Il savait comment garder le monde doux, rond, sans creux ni pointe, ni caillou sous la langue.

Mais un jour, un homme étrange est arrivé. Il n’avait pas d’ailes. Il n’avait ni dentelle ni ruban. Il riait fort. Il disait ce qu’il pensait, sans passer ses idées à la passoire à douceur. On l’appela l’Impertinent de la Colline.

Il racontait des histoires sans morale bien fixée, des blagues sans avertissement, des idées qui sortaient des cases qu'on disait nauséabondes. Il disait que la vraie vie ne se coloriait pas avec trois crayons pastel. Très vite, la panique gagna les cœurs doux. Alors Bidulias est sorti de sa cabane en écorce polie. Il a levé les bras, parlé d’une voix très calme, et rappelé aux villageois ce qu’ils savaient déjà :

« L’harmonie et la quiétude sont plus importantes que la vérité et la liberté. »

Les fées ont dansé autour de l’Impertinent. Elles ont chanté. Elles ont tourbillonné. Petit à petit, sa voix est devenue douce, ses mots mous, ses phrases bien rondes.

Puis un matin, il ne parla plus.

Bidulias posa une main sur son front, et dans un murmure sucré, déclara :

« Qu’il devienne ce que l’on piétine et que nul n’écoute. »

Et l’Impertinent devint un caillou. Un caillou muet. Joli. Poli. Inoffensif. Parfaitement conforme.

On le posa près du puits. Et chaque fée, en passant, lui donnait une petite tape — juste pour s’assurer qu’il ne bougeait plus — puis disait :

« Tu vois ? C’est mieux comme ça. »

Et depuis ce jour, le monde de Sucre-Puits est resté joyeux, sans sarcasme, sans secousse, lisse comme un lac sous calmant.

FIN.


Je suis resté là. Assis. Silencieux. Et j’ai compris.

C’est donc ça qu’ils attendent de moi. Ce genre d’histoire. Une histoire édulcorée, bien peignée, pleine de sucre et de petits sorts sans conséquence. Une fable pour endormir les consciences. Un modèle pour corriger l’ironie, ensevelir l’esprit critique sous des pelletées de miel.

Je comprends pourquoi ce conte a été choisi comme exemple. Il est tout ce que ce Centre tente de faire de moi : Un être conforme. Un homme corrigé. Un esprit aplati. Un conteur bienveillant qui ne mord plus.

Alors je suis ici. Seul. Dans ma cellule. Pendant que les autres rient dans la cour, probablement en jouant au ballon sans compter les buts, pour ne pas encourager la compétition. Et moi, entre deux crissements de la voix de La Chanteuse, je pense à mon conte. Je suis puni. Pas pour une erreur. Mais pour une vérité trop habillée en fiction.

Et peut-être, au fond, que ce conte-là disait ce que je ne peux plus dire autrement. Alors je le garde. Contre moi. Comme une arme silencieuse.

Votre très dévoué et irrévérencieux.

Schaltzmann.
schaltzmann
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par schaltzmann » sam. avr. 26, 2025 1:57 pm

Ce récit est une histoire, une fiction. Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d'une pure coïncidence.

JOUR 14 – Bloc C, Cellule 21

Il ne s’est rien passé aujourd’hui. Rien de visible, en tout cas. Le genre de journée qu’on efface de soi comme une tache de buée sur une vitre. Pas d’altercation. Pas de convocation disciplinaire. Pas même un haussement de voix dans les couloirs. Un calme administratif, neutre, parfait, presque louche. Ils aiment ça ici : les journées sans relief, les existences qui filent sans résistance, les hommes qui s’étiolent sans bruit. On nous a laissé en paix. Pas de visite. Pas d’atelier. Juste la routine, douce et sournoise, qui finit par polir l’âme à force de tout contourner sans jamais rien heurter.

Seule exception : elle. La Chanteuse. Fidèle au poste. Elle a chanté toute la nuit, comme un supplice personnalisé qui ne connaît ni pause ni pitié. Toujours cette même voix, trop haute, trop tendue, qui vrille l’air comme une lame de rasoir. Ses vocalises ne suivent aucune logique musicale connue. C’est un chaos sonore, une stridence déguisée en offrande artistique. Et pourtant… je m’y fais. C’est sans doute ça, le pire. Je m’habitue à sa présence comme on s’habitue à un acouphène chronique. Je n’essaie plus de l’ignorer : je l’intègre. Elle est là, en fond. Un bruit de tuyauterie dans les cavités de mon crâne. Elle devient silence par saturation. J’en viens à me demander si ce ne sont pas mes tympans qui ont rendu les armes, irrémédiablement. Un petit suicide sensoriel pour préserver ce qu’il reste de moi.

Le reste de la journée s’est dissous dans cette lenteur habituelle. Les repas sans goût. Les consignes dispensées d’une voix monocorde. Le regard vide des gardiens. Les murs et les sols comme toujours, propres à l’excès, comme si la désinfection permanente pouvait compenser l’infection morale. Même les autres détenus semblaient avoir baissé d’un cran dans la tension. Moins d’ironie. Moins de sarcasmes. Tout le monde glissait dans le même coma.

Un jour calme, donc. Un jour sans rien. Mais ici, les jours calmes ne sont jamais anodins. Ce sont des armes lentes. Ils ne blessent pas. Ils érodent. Ils grignotent ce qu’il reste de colère, de rire, de résistance. Et moi, ce soir, dans ma cellule tiède, je sens que quelque chose se prépare. Pas de façon précise. Plutôt comme une pression dans l’air. Une vibration trop régulière. Un battement que je sens sans pouvoir le définir.

Demain, je pense, on changera de registre. On quittera le calme pour autre chose. On remettra du désordre dans l’ennui. Je ne sais pas encore sous quelle forme. Mais je sais que ça arrivera.

JOUR 15 – Bloc C, Cellule 21

6h30.
La sirène. Toujours la même. Un cri métallique, chirurgical, qui fend le crâne comme une hache affûtée. Mais ce matin, étrangement, il y avait… du silence. Un silence relatif, certes, mais suffisamment inhabituel pour mériter d’être noté. La Chanteuse n’est pas venue.

Pas de vocalises en anglais approximatif. Pas de ukulélé agressif. Pas de torture sonore. Rien. Un gardien l’a murmuré dans le couloir, comme une nouvelle trop importante pour être formulée trop fort : “Elle a été appelée ailleurs. Bloc F. Les Japonais.”

Le Bloc F. Les Japonais. Officiellement, ce sont des pensionnaires comme les autres. Officieusement, personne ne comprend vraiment pourquoi ils sont là, ni ce qu’ils mijotent dans leurs longues journées de silence et de pliages de papiers. Mais pour que l’administration ait jugé bon de leur envoyer la Chanteuse en urgence… c’est qu’ils ont commis l’irréparable. Peut-être un haïku trop ambigu. Peut-être une main au majeur tendu en origami.

Quoi qu’il en soit, je leur adresse en silence mes remerciements.

Petit-déjeuner : Un bol de gruau d'avoine détrempé, deux tranches de pain complet aux bords secs, et un yaourt au soja nature, d'une blancheur maladive. Rien ne craquait, rien ne fondait, rien ne sentait quoi que ce soit.

Et puis vient l’Atelier du Vivre Ensemble. Encore.

Titre officiel : Module d’intégration collective par l’acceptation consentie des altérités.
Ce qui, en langage humain, veut dire : "Apprenez à aimer ceux que vous ne supportez pas, sinon vous êtes un danger social.". Voilà qui est ironique.

Une salle blanche, des chaises en cercle, un animateur au sourire Ultra Brite, un tableau numérique où s’affichent des phrases comme :
La différence est une richesse.”; “La cohabitation est un devoir civique.”; “Le dégoût n’est qu’une peur mal informée.

Aujourd’hui, le thème était : “Coexister avec ce qu’on ne comprend pas.

On nous a expliqué, sérieusement, qu’il fallait, je cite, “embrasser la présence de l’autre comme une chance, même si cet autre est agressif, insultant, pervers, ou carrément incompatible avec votre structure mentale.” Car, nous dit-on, “la vraie paix se construit en se niant soi-même et en se projetant vers l'autre.”

On nous a tendu une fiche cartonnée avec des mots à placer dans des phrases : inclusion, accueil, suspension du jugement, joie de la différence, fusion éthique…

Et en conclusion, cette phrase, claire pour eux, obscure pour moi et quelques autres : “La tolérance ne se discute pas. Elle se ressent. Profondément. Obligatoirement.

Youri, mon pote Russe, a levé la main pour dire qu’il ne voulait pas ressentir quoi que ce soit vis-à-vis de son voisin qui sent le poisson pas frais et qui récite du Sartre et du Camus nuit après nuit. L'animateur lui a répondu que c’était justement ça, la beauté du vivre-ensemble : apprendre à aimer d'autres philosophies, même si elles sentent mauvais. Youri a levé les yeux au ciel en soufflant et en remuant la tête. On lui a demandé de laisser tomber les sarcasmes issus d'un conditionnement slave et viriliste. Il s’est tu.

Moi, j’ai pris des notes. Pas pour participer mais pour m'occuper.

Une heure trente. Une heure trente à écouter qu’il faudrait dire merci si quelqu’un crache dans notre soupe. Oui, merci, parce que ça voudrait dire qu’il nous accepte dans son petit monde, qu’il partage un morceau de lui, sans calcul, sans juger, sans rien attendre.
Et encore une heure trente à nous enfoncer l’idée que la tolérance, ce n’est pas juste sourire poliment. Ce n’est pas une façade. C’est une vraie bataille intérieure, un devoir du cœur.

Et quand j’ai demandé s’il était possible de tolérer quelqu’un sans avoir à le fréquenter, l'animateur a souri, pincé les lèvres, et murmuré :
— “Ce genre de question prouve qu'en tant que vous-même, vous avez encore un peu trop de vous en vous.

Retour cellule.
10h30. Couloir vide. La porte se referme doucement derrière moi. Le néon clignote au plafond comme un soupir fatigué. Je m’installe. Et là, sans prévenir, je le sens venir. Ce besoin. Ce picotement dans la main. Ce crayon qui appelle. Ce carnet. Ma bouffée d'air quotidienne.
Et c’est là que je pense à eux. Aux autres. À ceux qu’aucun atelier ne saurait inclure sans sombrer dans la folie collective.

D'abord, aMi-ami Dolphins.

On l'appelle ainsi parce qu'il se prend parfois trés sérieusement pour un dauphin. Et parce qu'il veut faire ami-ami avec tout le monde. Enfin… tout le monde sauf ceux qui ne rentrent pas dans son jeu. Ceux qui gardent leurs distances, qui ne marchent pas dans son délire. Ceux-là, il ne les supporte pas. Pas de juste milieu pour eux : direct, ils deviennent des traîtres, des fauteurs de trouble, des ennemis du "grand courant"

Il est là depuis quelques jours. Ancien pensionnaire du Bloc 1, réservé aux cas psychiatriques les plus lourds, il a été jugé stabilisé après des années de traitement. Les psys ont décidé de le transférer ici, au Bloc C, pour "réinsertion expérimentale".

Mais moi, je vois ce que les autres ne voient pas. aMi-ami Dolphins, c’est un labyrinthe de voix. Un patchwork de personnalités. Une peluche possédée.

Parfois encore, il s’imagine dauphin. Il tourne en rond, bras tendus en nageoires, poussant des sifflements aigus en cherchant “le courant”. D’autres fois, il devient commentateur sportif, mais pas n’importe lequel. Celui qui étudie, qui explique, qui dissèque.

Il peut passer des heures à analyser en détail les chances infimes que l’US Chichigneux parvienne à battre la Juventus Grobourg en demi-finale du tournoi Interzones.
Il connaît la fiche complète de Redouane Rasefoune, l’avant-centre prometteur de l’Olympique Glinmard, et il est catégorique :

— « Non, Redouane ne signera jamais au Real Flavignac. Trop de pression médiatique. Le système de jeu de Flavignac ne convient pas à son profil d’attaquant flottant. Et puis y’a eu l’affaire de la s€x-tape avec la danseuse cul-de-jatte du Moon City de Champillou-les-Clapettes. Tout le monde s’en souvient. »

Il dit ça sans rire. Il parle aux murs. Aux néons. À son genou droit, qu’il surnomme parfois Didier.

Mais surtout, il parle seul. Pendant des heures. Il répète, radote, ressasse. Il reformule des conversations imaginaires, répond à des gens qui n’existent pas, salue des amis invisibles et menace des ennemis qui vivent uniquement dans sa tête. Mais ce qui l’obsède depuis son arrivée ici, ce n’est pas le ballon rond. C’est Le Parloir. Ce lieu. Ce sas. Ce petit miracle du soir où nous, les amis du verbe, nous réunissons pour rire, pour jouer, pour rester vivants. Rien de plus.

Mais dans son esprit fissuré, Le Parloir est devenu une légende noire. Un lieu de vices, de conspirations, de rituels obscurs, de plaisirs inavouables. Il pense qu’on y fomente des plans, qu’on y échange des caresses interdites, des pensées criminelles, qu’on y passe trop de temps pour ne pas cacher quelque chose. Et alors, chaque soir, il tente d’entrer. Il vient, le sourire figé, les pupilles dilatées par quelques médicaments oubliés, les mains jointes comme s’il s’apprêtait à prier :

— “Je suis votre ami ! J’ai vu les signaux ! La Crevette était verticale hier, j’ai compris le message ! Je dois entrer, je suis attendu !

Les gardiens le repoussent. D'abord poliment. Puis fermement. Et alors, il déraille. Il hurle. Il s’énerve. Il se déshabille. Complètement.

Nu, le sexe tendu vers le plafond comme un périscope ridicule, il court dans les couloirs en hurlant :

— “Le Parloir est une secte ! Une secte lubrique et codée ! Une partouze d’idées sales ! Ils ont des codes aquatiques et des pactes de chair ! Ils me refusent parce que je suis pur ! JE SUIS PUR !

Et hier soir, il n'était plus seul. Une autre silhouette s’est glissée derrière lui, à la lisière de notre monde. Et c'est ensuite à elle que je pense : Jeanninou. Elle aussi vient du Bloc 1. Moins connue que lui, mais tout aussi dangereusement imprévisible. On la voit parfois errer, échappant à la vigilance des infirmiers et des gardiens. Une ombre en robe de chambre et en chaussons usés, traversant les couloirs d'un pas irrégulier, les yeux pleins de visions qu’elle seule perçoit.

Hier, il n’aura pas fallu grand-chose pour que tout bascule. Cela faisait plusieurs jours déjà que Jeanninou entendait parler du Parloir. Des bribes de phrases, des échos de voix filtrant sous les portes, quelques mots attrapés au vol. Depuis, ça la hante. Jour après jour, heure après heure, son cerveau malade a tissé ses propres légendes. Elle s’est inventé des rituels cachés, des messes interdites, des danses obscènes sous nos néons blafards. Dans sa tête, le Parloir est devenu un repaire d’ombres et de pactes noirs, dirigé par un gourou malfaisant animé de sombres desseins.

Plusieurs fois déjà, elle avait tenté de frapper à la porte. Plusieurs fois, ses plaintes étouffées avaient parcouru les couloirs, portées en écho jusqu’à nos oreilles, éraillées par la distance. Mais hier soir, la folie l’a emportée plus loin encore.

Jeanninou a reculé jusqu’au bout du long couloir, une quarantaine de mètres. Elle s’est élancée, robe de chambre flottant, chaussons battant l’air, tête en avant, dans une charge aussi pathétique que violente. Elle a foncé contre la porte blindée du Parloir. Le choc a été brutal, inouï. Et contre toute attente, la porte a cédé, dans un grand craquement métallique.

Elle s’est écroulée à nos pieds. Le front fendu, le sang coulant sur son visage livide, la mousse aux lèvres, mais avec ce sourire... ce sourire dément, à moitié effacé par la bave, et avec ses doigts tremblants, elle formait des cœurs tordus. Allongée sur le carrelage, elle hoquetait d’une voix caverneuse, rauque, comme venue du fond d’une gorge ravagée : "Zen ! Zen ! Toujours Zen !"

La folie avait cette fois totalement emporté Jeanninou. Et devant cette scène grotesque, absurde, tragique, nous sommes tous restés là, silencieux, autour d’elle. Immobiles. Pendant un bref instant, elle nous a presque arraché de la peine. Avec son front en sang, sa robe de chambre ouverte, ses gestes tremblants et son regard halluciné, elle n’était plus qu’une carcasse humaine, un éclat de dignité pulvérisé. Ca n'a duré qu'un instant. Très vite, des gardiens sont arrivés, alertés par le fracas. Deux d’entre eux l'ont saisie avec précaution, presque avec une lassitude professionnelle. Ils l'ont emmenée sans brutalité, direction l’infirmerie. Là-bas, on a soigné son front fendu, on a recousu tant bien que mal ce que la porte avait ouvert, et surtout, on lui a administré la seule thérapie que ce Centre sache vraiment offrir : une piqûre sèche, un calmant pour canaliser ses bouffées délirantes. Après quoi, sans cérémonie, Jeanninou a été renvoyée au Bloc 1, là où l’on parque ceux dont le cerveau, qui, à force d’avoir été bien trop lessivé par des années de conditionnement humaniste, d’idées imposées de partage et de tolérance, ne réussit plus à voir autre chose que le diable dès que quelque chose sort un peu du moule.

Mais nous, dans le Parloir, nous ne conspirons pas. Nous jouons, on se pose des questions, on se répond, on partage, on parle de tout, de rien. Nous racontons des souvenirs. On invente des mots. On rit. Nous exultons d’être encore là, ensemble.

Et peut-être… peut-être que c’est ça, le problème. C’est peut-être ça, au fond, qui les rend fou.

Ce n’est pas ce qu’on fait. C’est qu’on le fait sans eux. Sans code. Sans message secret. Juste… pour être bien.

Et ce bien-là, ce simple luxe d’être ensemble, sans supervision ni règles, sans punition, sans pédagogie intégrée, ce petit cercle clandestin, c’est peut-être la chose la plus subversive de tout ce Centre.

Et je les entends, parfois. Au loin. Dans les couloirs du Bloc 1. Des voix étouffées, des soupirs amers, des chouineries en cascade. Des pleureuses qui ne comprennent pas pourquoi eux, ils n’y ont pas droit. Qui rêveraient de voir ce lieu disparaître, cette enclave païenne aux contours mystérieux, non pas parce qu’ils s’en méfient… Mais parce qu’ils n’y sont pas admis.

Qu’ils y restent. Au Bloc 1. Là où l’on traite les révoltes à coup de calmants, où l’on anesthésie les colères à grand renfort de cachets, où l’on bâillonne les déviances par une seringue vidée judicieusement et un sourire de soignant bienveillant.

Qu’ils y restent, à baver sur leurs oreillers, à envier nos soirées, à inventer des orgies là où il n’y a que des blagues, à fantasmer des rites quand il n'y a que du jeu.

Nous, ici, au Parloir… nous ne sommes ni une secte, ni une société secrète, ni une zone grise.

Nous sommes juste un groupe de potes qui aimons nous retrouver ici, parce que c’est le seul endroit qui reste où ils peuvent encore venir jusqu’à moi.

Et pour eux, pour le système, c’est ça le plus intolérable.

Votre très dévoué, et toujours irrévérencieux,

Schaltzmann.
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par ChicagoBears » sam. avr. 26, 2025 3:39 pm

schaltzmann a écrit : sam. avr. 26, 2025 1:57 pm D'abord, aMi-ami Dolphins.

On l'appelle ainsi parce qu'il se prend parfois trés sérieusement pour un dauphin. Et parce qu'il veut faire ami-ami avec tout le monde. Enfin… tout le monde sauf ceux qui ne rentrent pas dans son jeu. Ceux qui gardent leurs distances, qui ne marchent pas dans son délire. Ceux-là, il ne les supporte pas. Pas de juste milieu pour eux : direct, ils deviennent des traîtres, des fauteurs de trouble, des ennemis du "grand courant"

Il est là depuis quelques jours. Ancien pensionnaire du Bloc 1, réservé aux cas psychiatriques les plus lourds, il a été jugé stabilisé après des années de traitement. Les psys ont décidé de le transférer ici, au Bloc C, pour "réinsertion expérimentale".

Mais moi, je vois ce que les autres ne voient pas. aMi-ami Dolphins, c’est un labyrinthe de voix. Un patchwork de personnalités. Une peluche possédée.

Parfois encore, il s’imagine dauphin. Il tourne en rond, bras tendus en nageoires, poussant des sifflements aigus en cherchant “le courant”. D’autres fois, il devient commentateur sportif, mais pas n’importe lequel. Celui qui étudie, qui explique, qui dissèque.

Il peut passer des heures à analyser en détail les chances infimes que l’US Chichigneux parvienne à battre la Juventus Grobourg en demi-finale du tournoi Interzones.
Il connaît la fiche complète de Redouane Rasefoune, l’avant-centre prometteur de l’Olympique Glinmard, et il est catégorique :

— « Non, Redouane ne signera jamais au Real Flavignac. Trop de pression médiatique. Le système de jeu de Flavignac ne convient pas à son profil d’attaquant flottant. Et puis y’a eu l’affaire de la s€x-tape avec la danseuse cul-de-jatte du Moon City de Champillou-les-Clapettes. Tout le monde s’en souvient. »

Il dit ça sans rire. Il parle aux murs. Aux néons. À son genou droit, qu’il surnomme parfois Didier.

Mais surtout, il parle seul. Pendant des heures. Il répète, radote, ressasse. Il reformule des conversations imaginaires, répond à des gens qui n’existent pas, salue des amis invisibles et menace des ennemis qui vivent uniquement dans sa tête. Mais ce qui l’obsède depuis son arrivée ici, ce n’est pas le ballon rond. C’est Le Parloir. Ce lieu. Ce sas. Ce petit miracle du soir où nous, les amis du verbe, nous réunissons pour rire, pour jouer, pour rester vivants. Rien de plus.

Mais dans son esprit fissuré, Le Parloir est devenu une légende noire. Un lieu de vices, de conspirations, de rituels obscurs, de plaisirs inavouables. Il pense qu’on y fomente des plans, qu’on y échange des caresses interdites, des pensées criminelles, qu’on y passe trop de temps pour ne pas cacher quelque chose. Et alors, chaque soir, il tente d’entrer. Il vient, le sourire figé, les pupilles dilatées par quelques médicaments oubliés, les mains jointes comme s’il s’apprêtait à prier :

— “Je suis votre ami ! J’ai vu les signaux ! La Crevette était verticale hier, j’ai compris le message ! Je dois entrer, je suis attendu !

Les gardiens le repoussent. D'abord poliment. Puis fermement. Et alors, il déraille. Il hurle. Il s’énerve. Il se déshabille. Complètement.

Nu, le sexe tendu vers le plafond comme un périscope ridicule, il court dans les couloirs en hurlant :

— “Le Parloir est une secte ! Une secte lubrique et codée ! Une partouze d’idées sales ! Ils ont des codes aquatiques et des pactes de chair ! Ils me refusent parce que je suis pur ! JE SUIS PUR !
ça va tu t'amuses bien ? et tu nous prends vraiment pour des cons en fait non ?
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ChicagoBears
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par ChicagoBears » sam. avr. 26, 2025 4:01 pm

Et toi t'es "Shaltzco l'empereur mégalo" , fais gaffe de pas finir transformé en lama :P
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par CharogneStone » sam. avr. 26, 2025 7:29 pm

le prisonnier , serie TV noir/blanc ,des annees 70,avec comme acteur principal , Patrick McGoohan ,ou colorée pour les parents de l epoque qui avaient les moyens d investir dans une télé qui ne devait pas au prealable etre pré-chauffée , mais qui etait plus imposante que le meuble qui la soutenait ,je m en souviens et vous ? nostalgie quand tu nous tiens

https://www.youtube.com/watch?v=Csi15xzHXSA 1er episode 1967.
fabmanuel
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par fabmanuel » sam. avr. 26, 2025 9:43 pm

Haaaa SP....

savoureux mélange d'intelligences et d'inepties,
passe temps adorable et léger où prime le 3ème degré, espace de détente en fin de journée...
on se bise, on se rit au nez, on s'envoie des fleurs infanables et des sourires pleins de dents.
Sp, armé de personnes aux passés marqués et aux futurs incertains dépendants des diagnostics de nos plus beaux médecins.
Sp lieux de loisir, cour d'école bruyante et multicolore.
Scene de rires enjoués et d'espièglerie brutalement stoppée, laissée en suspens ...
Vous venez armés de lames effilées, de coupe-gorges, de jugements brutaux et indignes de vous... prêts à tout pour garder la vedette, comme disait cette belle dessinatrice que je pense, une femme brillante de plus je me dois de retourner à mes flagorneries, puis donc et soudainement ignoré par d'ex copinous...sympas.

Sachez chers tous que ma flagornerie, mes blagues répétitives et néanmoins douteuses n'ont d'autres buts que d'adoucir ma profonde dépression en ce monde si et trop brutal, et juste tenter de vous communiquer un peu de chaleur humaine et si possible, le Graal dessiner l'ombre de l'esquisse d'un sourire dans cette obscurité.

C'est vain, donc vaniteux,
ok vous brisez les sourires enfantins.

Vous devez avoir des vies si belles pour OSER faire de si menus et risibles reproches, je vous invite ds notre quotidien difficile mais empli de Bonheur et d'amour...des gros mots...

Merci de peser vos paroles toutes et tous ou bien à minima d'en extirper un sens humain à defaut de compassions et de plaisirs.

Sachez TOUS que je ne suis fâché avec personne,
je reconnais chaque qualité exprimée,
suis conscient de ce que je suis,
de ma niaiserie, de ma sottise et de mes répétitions.

Je ne vous demande pas d'attention, pas de réponses, je vous demande le respect de nos expressions communes, de nos désarrois, de nos douleurs passées présentes et a venir.

Cessez ces petites piques réciproques, le monde est grand, l'esprit se doit d'être large...

Sans jamais aucune rancune, et si humblement malgré mon propre égo à la con ( c'est normal suis le meilleur) je vous embrasse et vous considère.

Bon ça c'est fait, rien de grave hein,
le fabmanuel ne fixe ni ne fige je ne suis pas une vegetaline...
quoique...

Et surtout surtout, écoute, entraide, compréhension. sinon effacement provisoire,

plus encore que des bonheurs soient sur vos pas et sinon que l'humanité vous soutienne. bisous.

Fabmanuel votre bon petit diable.
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par ClaraBistouille » dim. avr. 27, 2025 12:07 am

LOL !

Mais on s'en fout ! C'est pas toi la vedette ! C'est Schaltzm'âne ^^
Tu m'rappelles la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf... ou que l'âne je n'sais plus ^^

Bref...
Ciao la compagnie ^^
Et comme d'hab : ne répondez pas j'en n'ai absolument rien à cirer ( y en a déjà que trop qui cirent les pompes ^^ )
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par fabmanuel » dim. avr. 27, 2025 2:45 am

La connerie est assomante, mais pire encore..la sottise est ennuyeuse.... bisous.
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par ChicagoBears » dim. avr. 27, 2025 1:06 pm

schaltzmann a écrit : sam. avr. 26, 2025 1:57 pm Nu, le sexe tendu vers le plafond comme un périscope ridicule, [aMi ami Dolphins] court dans les couloirs en hurlant :

— “Le Parloir est une secte ! Une secte lubrique et codée ! Une partouze d’idées sales ! Ils ont des codes aquatiques et des pactes de chair ! Ils me refusent parce que je suis pur ! JE SUIS PUR !
t'es un grand malade toi en fait ! et arrête de penser qu'on jalouse ton parloir tout moisi, c'est juste un élément de + qui montre ta mégalomanie ridicule :lol:
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par schaltzmann » lun. avr. 28, 2025 8:40 pm

Ce récit est une histoire, une fiction. Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d'une pure coïncidence.

JOUR 16 – Bloc C, Cellule 21

Depuis deux jours, quelque chose remue dans l’air. Ça ne fait pas de bruit franc, pas de grands gestes héroïques, mais ça vibre. Une vibration sourde, gluante, comme un début de moisissure sur un bout de pain oublié. Dans le Bloc 1, chez nos voisins malades, les murmures s’épaississent. La jalousie, la vraie, celle qui couve dans les regards en biais, a trouvé son aliment préféré : le Parloir.

Ils n’en peuvent plus. De nous savoir là, entre quatre murs trop blancs, à oser sourire encore, à oser parler librement, à oser respirer. Ça les rend fous, littéralement. J’entends leurs lamentations grimper le long des conduits, ricocher dans les couloirs, venir mourir contre ma porte comme des vagues mortes. Chaque soir, alors que je m’installe avec les miens, alors que les rires montent, je sens leur rage humide tapisser les murs. Ils voudraient que le Parloir disparaisse. Ils voudraient que nous soyons punis d’être encore debout.

Parfois, cela ressemble au début d’une insurrection. Des cris, des coups contre les murs, des revendications hurlées dans des dialectes uniquement compris par les spécialistes en camisoles chimiques. Ça tape, ça beugle, ça menace. On croirait que la Révolution est pour demain matin. Mais au final, ça n'accouche de rien. Parce que pour soulever un système, il faut autre chose que de l'écume aux lèvres et des idées percées comme une passoire. Eux, ils sont trop cabossés, trop seuls, trop bêtes parfois, pour s'organiser vraiment. Chacun lutte pour sa petite médaille imaginaire, chacun hurle pour son petit orgueil éclopé. Pas de plan. Pas de stratégie. Juste des batailles d’ego minuscules, aussi pathétiques que des bagarres de chats de gouttière.

Ce qu’ils rêvaient de faire exploser en une bombe H destructrice ne dépasse jamais l'état de vieux pétard mouillé : ça fume, ça sent la vieille chaussette, et ça fait rire tout le monde sauf eux. Moi, je les regarde, parfois de ma cellule, parfois derrière les barreaux du Parloir. Je les entends, je les devine, eux et leur agitation d'insectes malhabiles. Ils m’arrachent parfois un sourire. Mais à dire vrai, je souris surtout pour ne pas pleurer.

Le Bloc 1, ses âmes en décomposition, ses cerveaux lessivés par des années d'humanisme mal digéré, ses pensionnaires trop faibles pour haïr autrement que par petites giclées mesquines, tout cela ne provoque chez moi qu’une vague pitié. Une compassion désabusée pour certains, ceux qui furent un jour, avant de se perdre dans leur propre bavouille, presque sympathiques. J'ai partagé parfois des éclats de vie avec eux, autrefois. Avant qu’ils ne brandissent contre moi le décret d’infamie, la sentence suprême réservée aux traîtres imaginaires.

J’en entends même certains qui s’indignent, mais pas de mon incarcération, ni du traitement inhumain qui m’est infligé ici jour après jour. Non. Ils s'indignent que la direction du Centre ait encore la bassesse, le crime, l'hérésie de me laisser un Parloir. C’est de cela qu’ils pleurent. Pas de ma cage mais de mon répit.

De cellule en cellule, de bave en salive, les mots tournent et grossissent comme des rats dans une cave. Quelques noms me sont parvenus, par échos déformés, ou plutôt quelques surnoms pathétiques. Comme celui-là, fraîchement exhumé : JamesPaslesTwix. À lui seul, tout un poème. Il paraît qu’il a pris la peine d’écrire au directeur pour dénoncer l’existence même du Parloir. Pourquoi ? Dans quel but ? Personne ne le sait. Et sans doute même pas lui-même.

On murmure qu'il souffre d'une maladie rare, appelée dans les milieux psychiatriques la quérulence. Le syndrome des plaideurs fous. Je me l'imagine déjà, à l'extérieur, en train d'intenter un procès contre Intermarché ou Auchan pour avoir oublié de lui déduire son bon de réduction de 75 centimes sur un paquet de petits beurres. Un modèle de patience et de grandeur d’âme.

Je les entends aussi, les autres, les auto-proclamés "éclairés", "respectueux", "francs", "honnêtes"… Ceux qui tournent le dos aujourd'hui à ceux à qui, hier encore, ils faisaient des bises dégoulinantes d'hypocrisie sur le pas des portes. Ceux-là, je les vois. Je les reconnais. Ils sont laids, l’écume aux lèvres, remuant de leur rage malade avant de recevoir leur piqûre quotidienne de Midazolam Sun, qui les replongera bientôt dans cet état semi-végétatif qui sied si bien à leur sens aigu de la dignité.

En dehors de ces constats amers, il ne s’est rien passé de particulier aujourd’hui. Pas d’émeute. Pas de victoire. Juste la même lassitude suintante. Juste la machine qui continue à tourner, inerte, dévitalisée, comme si tout cela n'était qu'un mauvais rêve devenu système.

JOUR 17 – Bloc C, Cellule 21

Après tout ce cirque grotesque, ce matin, la direction du Centre nous a gratifiés d'une nouveauté pédagogique : l’atelier "Apprendre à reconnaître l'honnêteté de l'hypocrisie".

Tout est dans le titre. Une masterclass de foutage de gueule institutionnalisé. On nous a alignés en cercle, comme d’habitude, sous le regard flasque d'une animatrice au brushing de traviole et au sourire calqué sur les modèles de militantes féministes. Le programme du jour : reconnaître les hypocrites autour de nous, les dénoncer poliment, puis faire notre autocritique pour avouer nos propres manquements à l’authenticité.

Oui, vous avez bien lu. On devait s’auto-flageller en équipe, en chantant des cantiques à la pureté relationnelle.

Pour briser la glace, l’animatrice a eu cette lumineuse idée : distribuer des cartes. D'un côté, "Honnête". De l'autre, "Hypocrite". Et chacun devait tendre la carte correspondante à son voisin après un tour de parole.

J’ai failli me pisser dessus de rire.

Youri, fidèle à lui-même, a reçu trois cartes "Hypocrite" sans broncher, puis a tendu un "Honnête" à l’animatrice en précisant : "C’est pour votre chien, si vous en avez un." Elle n'a pas compris. Tant mieux.

Quant à moi, j'ai écouté tout ce cirque, les doigts croisés sous la table, le regard ailleurs. Et je me suis imaginé Jeanninou, pas comme on l'a ramassée l'autre soir, pantelante et mousseuse, non. Mais en pleine pub Pliz des années fastes, la Marie-Pierre Casey du pauvre, lancée à tout berzingue sur le carrelage lustré du couloir, bras le long du corps, sourire d’anguille en bout de course, avant de venir se fracasser contre la porte blindée du Parloir. Et puis, comme dans la réclame, elle se serait relevée, la trogne fendue, fière comme un dindon de basse-cour, en hurlant comme une folle : "Cool Raoul ! Relax Max !

L'atelier a fini comme il avait commencé : dans un brouillard d'absurdités sucrées. Après deux heures d'échanges mous où l'on a vu défiler les mêmes mots creux - authenticité, franchise, honnêteté - l'animatrice a ramassé les cartes et, les yeux embués d'une satisfaction que seule une conscience chimiquement obtuse peut produire, nous a remerciés pour notre sincérité. Nous étions, paraît-il, "en bonne voie vers une communication plus saine". Elle a conclu la session par un dernier conseil, glissé comme un poison dans une tasse de camomille : "Rappelez-vous... celui qui doute de la sincérité des autres cache souvent son propre masque." Un dernier tour de vis, une dernière gifle molle sous couvert de pédagogie. Après quoi elle a disparu derrière sa porte blindée, laissant dans la salle une odeur de café tiède et de fausse rédemption.

L'après-midi, pour varier les plaisirs, on nous a annoncé un nouvel atelier intitulé "Initiation à la confiance participative". Le programme était simple : exercices de lâcher-prise, jeux de coopération, et pour finir en beauté, la construction collective d’une "toile de confiance", réalisée avec des fils de laine multicolores.

Et pour rendre l’exercice "plus ludique", ils nous avaient collé dans les pattes un tricotin en bois, peint couleur rose crevette trop cuite, avec une tronche de ravi de la crèche, deux yeux ronds comme des œufs au plat et un sourire béat vissé jusqu’aux oreilles. Rien qu’à le tenir, ce machin, j’avais envie de lui refaire le portrait à coups de taloche, juste pour voir s’il souriait encore une fois explosé contre un mur.

Chacun devait tisser son fil en le passant de main en main, formant ainsi un grand filet arc-en-ciel censé représenter nos liens invisibles. Il fallait, pendant qu’on tricotait, chuchoter à son voisin une qualité que l’on croyait déceler en lui. Une véritable anthologie de l'hypocrisie appliquée.

Youri, toujours lui, a lancé son fil à un type qu’il ne pouvait pas blairer en lui soufflant : "Toi, t'es gentil, au village on t'aime bien depuis que le chien est mort." Moi, j'ai reçu mon fil avec un compliment douteux sur ma "présence discrète qui voit tout et dit rien", ce qui dans leur bouche valait sans doute une mise en garde autant qu’un hommage involontaire. Tout ce joli maillage devait, paraît-il, nous aider à "réintégrer les cercles de confiance démocratique et bienveillante" d’ici la prochaine évaluation trimestrielle. En attendant, ça ressemblait plus à un radeau de clochards qu'à l'Invincible Armada.

Je suis resté là, quelques minutes, un bout de laine ridicule au bout des doigts, à observer cette écharpe grotesque grandir sous les néons. Puis, comme à mon habitude, j'ai tout lâché. Sans bruit. Sans explication. Juste pour voir leur construction s'affaisser un peu, comme leur pauvre simulacre d’âme.

Votre très dévoué, et toujours irrévérencieux,

Schaltzmann.
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par ChicagoBears » mar. avr. 29, 2025 12:53 pm

Le fantasme de penser qu'on n'en peut plus de vous voir heureux sur ce salon privé :lol:
On s'en fout en fait !
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

Message par ChicagoBears » mar. avr. 29, 2025 2:23 pm

JamesPaslesTwix

ah un nouveau personnage youpi, faut vraiment que tu sortes ça en livre :lol: Prix Goncourt assuré :lol:
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