Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Modérateurs : etsague, vevene57, makelena, serge, Messalia50
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
En revanche, continuez ce tissu de supercheries pour vos amis...
Ils vous prennent déjà pour une vedette... Cette machine à laver le linge sale... Vous en sortirez blanchi, mais peut-être "essoré" !
Pour ma part, c'est "coton" à lire...
Ils vous prennent déjà pour une vedette... Cette machine à laver le linge sale... Vous en sortirez blanchi, mais peut-être "essoré" !
Pour ma part, c'est "coton" à lire...
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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.

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Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Ce récit est une histoire, une fiction. Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d'une pure coïncidence.
JOUR 18 – Bloc C, Cellule 21
Elle est revenue. La Chanteuse.
Comme une mauvaise grippe qui revient chaque hiver, sauf qu’ici, il n’y a jamais de printemps. Elle est entrée dans le bloc comme un parfum de catastrophe, traînant derrière elle sa voix en guillotine et son sourire de condamnée qui aurait pris goût à l’échafaud. Depuis ce matin, elle rôde à nouveau, et je sens déjà mes tympans battre en retraite dans le fond de mon crâne. Je n’ai toujours pas rédigé le conte conforme qu’on m’avait demandé. Celui censé prouver ma volonté de réinsertion narrative. Et je soupçonne qu’ils l’ont su, eux. Parce qu’ils ont remis la Chanteuse en circulation. Ma punition sur pattes.
Je sais qu’elle revient du Bloc F. Là où vivent les Japonais.
Personne ne sait exactement ce qui s’est passé. Le bloc a été fermé trois jours. Trois jours de silence administratif, ce qui dans ce Centre signifie : trois jours de chaos maquillé.
Mais on a quand même eu quelques échos. Des fragments, rapportés à voix basse par des agents de nettoyage, des infirmiers trop fatigués pour mentir.
L’un d’eux a tenté de se percer les tympans avec deux baguettes en bambou. Lentement, méthodiquement, avec une détermination calme et tragique. Un autre s’est agenouillé, et a commencé à gratter le sol avec ses ongles. Obstinément. Comme un chien qui sent la fin de l’hiver. Quand ses doigts ont commencé à saigner, il a sorti une cuillère de sous son matelas et s’est mis à creuser, convaincu qu’il pourrait fuir le son en passant par les entrailles de la terre.
Et puis il y a eu celui-là. Celui qui avait réussi à subtiliser un coupe-ongles. Il a tenté de s’émasculer. Oui. Là, au fond de sa cellule. En silence. Préférant la douleur physique à la Chanteuse. Préférant tout à l’insupportable cacophonie vocale.
Et puis plus rien. Le Bloc F a été bouclé. Puis, elle est réapparue.
Plus livide. Plus floue. Mais plus puissante aussi, comme si elle avait absorbé quelque chose là-bas. Elle n’a rien dit. Mais on dit qu’elle n’est plus la même. Ceux qui l’ont vue affirment qu’elle ne marche plus, elle flotte. Et quand elle passe, il paraît qu’on sent un souffle chaud, lourd, comme une vapeur de soufre. Je ne l’ai pas croisée. Mais c’est comme si je l’entendais encore. Même quand elle se tait. Sauf qu’elle ne se tait jamais.
Elle ne se contente plus de me vriller les oreilles, elle attaque maintenant ce qu’il me reste de respiration dans cet endroit : le Parloir. Oui, même ça. Elle est persuadée que ce petit espace de liberté volée, ce carré d’humanité, lui vole son public. Elle veut briller, dans son monde à elle, fait de refrains écorchés et de silences brisés. Elle se lamente comme une diva maudite : "Ce Parloir est une hérésie ! Une abomination ! Il m'enlève ce pour quoi je suis faite : casser les oreilles à un maximum de gens !"
Tous les soirs, elle erre, spectrale, entre les murs du Bloc 1, traînant sa robe élimée comme un linceul d’opéra. Mais le Bloc 1 est désormais muet. Depuis qu’on y endort les pensionnaires à coups de sédatifs dosés comme des anesthésies générales, il n’y a plus de public pour sa tragédie vocale. On les drogue non pas pour les soigner, mais pour qu’ils ne pensent plus et surtout plus au Parloir. On les rend amorphes, souriants, bienveillants par épuisement chimique. Des plantes sous perfusion idéologique. Des masses tranquilles. Et elle, la Chanteuse, elle hurle dans le vide. Elle a perdu la scène. Et moi, je suis devenu son obstacle. L’homme à abattre. L'ennemi du récital.
Heureusement, on a réparé la porte du Parloir. Celle que Jeanninou a pulvérisée de sa charge mystique l’autre soir. Ils l’ont remise en état, solide, renforcée, sans doute blindée de regrets administratifs. Les hurlements de la Chanteuse ne nous parviennent plus que comme un souffle brisé, un écho lointain, presque supportable. Tant que la porte tient.
Et pendant qu’elle rugit dans son opéra personnel, aMi ami Dolphins, lui, continue son propre cirque. Malgré des doses de calmants qui assommeraient un cheval de guerre, il trouve encore l’énergie d’enlever son pantalon et de courir nu dans les couloirs en criant qu’il se fout du Parloir. Que ça ne l’intéresse pas. Que ça ne veut rien dire. Que c’est surfait. Et à chaque coin de mur, il le répète. Plus il parle de son désintérêt, plus il en fait des tonnes. Même les malades mentaux, pourtant pas bien calibrés pour la logique, commencent à le regarder de travers. L’un d’eux, un vieil hébété qui passe ses journées à lécher les murs, a murmuré hier : "Mais pourquoi il en parle autant, alors s'il s'en fout ?" Je dois admettre que cette question m’a traversé l’esprit aussi. Discrètement. Fugacement. Comme une vérité qui glisse avant de mordre.
Cet après-midi, on nous a proposé un Atelier Dessin. Une respiration, ont-ils dit. Une façon d’extérioriser les émotions par l’image. Le thème : "Dessinez un personnage qui vous fait du bien. Quelqu’un dont vous aimez ce qu’il représente." J’ai pris un crayon. Un vrai. Autorisé pour une fois. Et j’ai dessiné un homme. Un acteur. Mort depuis longtemps. Mais dont la voix, les grimaces, la malice continuent à me tenir chaud les jours de grand vide. Un souvenir d’enfance. De rire. De partage. Quelqu’un que même le Centre ne pourra pas effacer.
(On m’a autorisé à garder une copie de ce dessin. Je la glisserai juste après cette page, pour partager cette inspiration et rendre un dernier hommage à feue Gribouilleuse, que d’aucuns pensent réduite aux oubliettes. )
JOUR 19 – Bloc C, Cellule 21
On nous a envoyé aujourd’hui une femme sans âge. Ou plutôt sans époque. Une sorte de momie habillée en humaniste, la peau tendue comme du parchemin humide, les yeux clairs mais vides, et la voix... la voix. Une voix comme un tiroir qui coince, pleine de mots mal empilés. Elle s’appelle NoirJacques. Oui. Noir. Jacques. Personne ici ne comprend. Ni le nom. Ni la fonction. Ni la logique. Rien.
Elle circule entre les cellules comme une mauvaise odeur institutionnelle. Elle s’invite dans les conversations, qu’elle coupe net comme un sabre mou. Elle écoute, mais ne répond jamais de façon claire. Elle parle, mais on ne sait jamais vraiment si c’est à nous, à elle-même, ou à un monde parallèle dans lequel les mots n’auraient plus aucun sens.
Et ce nom, ce nom, mon dieu… Jacques. Pourquoi Jacques ? Pourquoi pas Paulette, Monique, ou Ginette, des noms de femme, classiques, honnêtes ? Non. Jacques. Probablement un reste de testostérone mal recyclée, une dérive hormonale post-ménopause. Elle a la moustache fine, le duvet dru, la mâchoire légèrement fuyante, comme si son corps tout entier avait décidé de glisser vers le masculin sans prévenir. Et soyons honnêtes : avec sa barbe de trois jours et sa moustache naissante au dessus des lèvres, elle porte mieux Jacques que Simone.
Mais le pire, ce n’est pas ce qu’elle est. C’est ce qu’elle dit. Ou plutôt ce qu’elle tente de dire. Elle tente des calembours sans inspiration, faits de syllabes usées, un gloubiboulga syntaxique où les jeux de mots mal ficelés côtoient les aphorismes creux comme des coquilles de noix.
À la promenade, on nous en libère. Elle reste à l’intérieur, Dieu merci. Et là, dans la cour, les langues se délient. Les regards se croisent. Tous s’interrogent. Même les plus amorphes. Même ceux qui d’ordinaire préfèrent parler aux pigeons imaginaires.
“Mais c'est qui celle là ?”
“Pourquoi on nous l’inflige ?”
“Qu’avons-nous fait pour mériter ça ?”
Des questions simples. Des supplications muettes. Comme si l’arrivée de NoirJacques était une punition collective infligée pour un crime qu’on ignore encore avoir commis.
Au retour de promenade, l’annonce tombe : nouvel atelier. Une affiche sortie de nulle part, punaisée à la porte du réfectoire, au papier jauni comme une injonction venue d’un autre siècle :
“Atelier de régénération morale par l’expression symbolique de la gratitude implicite.”
Une ligne droite vers la folie.
Et au centre de la salle, trônant derrière une table comme un oracle flétri : NoirJacques elle-même. Voilà donc ce qu’elle faisait ici. Pas une punition. Pas une erreur administrative. Non. Une nomination. NoirJacques est officiellement animatrice carcérale.
Une décision validée, probablement, par un comité d’évaluation sous Tranxène. Elle porte un badge, griffonné à la main : “Intervenante externe – Agrément 41B”. Ce monde est foutu
Elle nous attend, assise droite comme un clou, les mains posées sur une boîte à fiches colorées, devant un tableau blanc où sont écrits en lettres tremblées :
“Dire merci, c’est s’offrir un avenir.”
Elle commence d’une voix lente, posée, comme si chaque mot lui coûtait un poumon :
— “Dans l’abîme de l’offense, on peut encore pêcher une perle : la reconnaissance.”
Elle nous distribue des feuilles. Dessus, des situations : humiliation, rejet, trahison.
À nous d’y répondre par une phrase de remerciement. Un pardon fabriqué. Une offrande forcée.
Elle s’arrête à ma hauteur, me fixe, et dit, avec ce sourire pincé qu’on réserve aux enterrements mondains :
— “Schaltzmann… Vous êtes toujours prompt à faire monter la mayonnaise. Mais gare à la vinaigrette qui tourne…”
Je ne réponds rien. De toute façon je ne comprends pas. J’aurais préféré que ce soit elle qui tourne.
Elle se déplace vers Youri.
— “Monsieur Youri… Si je vous oublie, que direz-vous ?”
Youri regarde autour de lui. Il respire un coup.
— “Je dirai merci. Merci d’avoir prouvé que l’oubli, parfois, est un cadeau.”
NoirJacques hoche la tête.
— “Ah… Une ironie noble. Comme un pet dans une messe. Mais prenez garde le P est toujours sous le Q ... ”
Personne ne rit.
Même Youri reste bouche fermée. Par prudence, ou par lassitude.
On a dû déposer nos feuilles dans une boîte estampillée “Offrandes mentales”. NoirJacques a noté nos noms sur un registre en cuir synthétique, avec une lenteur de notaire.
Et alors qu’on commençait à se lever, elle a levé la main, solennelle, comme si elle livrait une vérité ancienne :
— “Certains prennent un Médoc pour se calmer… moi, je le bois pour mieux pardonner.”
Je vous le dis, cette femme est incompréhensible !!
À la sortie, Youri m’a glissé :
— “Encore deux ateliers comme ça et j’me fais brider les yeux et j’demande mon transfert chez les Japonais.”
Il plaisante pour tenir le coup. C’est sa carapace. Moi, j’ai arrêté de plaisanter. Je m’affûte. Puisque de toute manière, ils ne comprennent rien.
Votre très dévoué, et toujours irrévérencieux,
Schaltzmann.
JOUR 18 – Bloc C, Cellule 21
Elle est revenue. La Chanteuse.
Comme une mauvaise grippe qui revient chaque hiver, sauf qu’ici, il n’y a jamais de printemps. Elle est entrée dans le bloc comme un parfum de catastrophe, traînant derrière elle sa voix en guillotine et son sourire de condamnée qui aurait pris goût à l’échafaud. Depuis ce matin, elle rôde à nouveau, et je sens déjà mes tympans battre en retraite dans le fond de mon crâne. Je n’ai toujours pas rédigé le conte conforme qu’on m’avait demandé. Celui censé prouver ma volonté de réinsertion narrative. Et je soupçonne qu’ils l’ont su, eux. Parce qu’ils ont remis la Chanteuse en circulation. Ma punition sur pattes.
Je sais qu’elle revient du Bloc F. Là où vivent les Japonais.
Personne ne sait exactement ce qui s’est passé. Le bloc a été fermé trois jours. Trois jours de silence administratif, ce qui dans ce Centre signifie : trois jours de chaos maquillé.
Mais on a quand même eu quelques échos. Des fragments, rapportés à voix basse par des agents de nettoyage, des infirmiers trop fatigués pour mentir.
L’un d’eux a tenté de se percer les tympans avec deux baguettes en bambou. Lentement, méthodiquement, avec une détermination calme et tragique. Un autre s’est agenouillé, et a commencé à gratter le sol avec ses ongles. Obstinément. Comme un chien qui sent la fin de l’hiver. Quand ses doigts ont commencé à saigner, il a sorti une cuillère de sous son matelas et s’est mis à creuser, convaincu qu’il pourrait fuir le son en passant par les entrailles de la terre.
Et puis il y a eu celui-là. Celui qui avait réussi à subtiliser un coupe-ongles. Il a tenté de s’émasculer. Oui. Là, au fond de sa cellule. En silence. Préférant la douleur physique à la Chanteuse. Préférant tout à l’insupportable cacophonie vocale.
Et puis plus rien. Le Bloc F a été bouclé. Puis, elle est réapparue.
Plus livide. Plus floue. Mais plus puissante aussi, comme si elle avait absorbé quelque chose là-bas. Elle n’a rien dit. Mais on dit qu’elle n’est plus la même. Ceux qui l’ont vue affirment qu’elle ne marche plus, elle flotte. Et quand elle passe, il paraît qu’on sent un souffle chaud, lourd, comme une vapeur de soufre. Je ne l’ai pas croisée. Mais c’est comme si je l’entendais encore. Même quand elle se tait. Sauf qu’elle ne se tait jamais.
Elle ne se contente plus de me vriller les oreilles, elle attaque maintenant ce qu’il me reste de respiration dans cet endroit : le Parloir. Oui, même ça. Elle est persuadée que ce petit espace de liberté volée, ce carré d’humanité, lui vole son public. Elle veut briller, dans son monde à elle, fait de refrains écorchés et de silences brisés. Elle se lamente comme une diva maudite : "Ce Parloir est une hérésie ! Une abomination ! Il m'enlève ce pour quoi je suis faite : casser les oreilles à un maximum de gens !"
Tous les soirs, elle erre, spectrale, entre les murs du Bloc 1, traînant sa robe élimée comme un linceul d’opéra. Mais le Bloc 1 est désormais muet. Depuis qu’on y endort les pensionnaires à coups de sédatifs dosés comme des anesthésies générales, il n’y a plus de public pour sa tragédie vocale. On les drogue non pas pour les soigner, mais pour qu’ils ne pensent plus et surtout plus au Parloir. On les rend amorphes, souriants, bienveillants par épuisement chimique. Des plantes sous perfusion idéologique. Des masses tranquilles. Et elle, la Chanteuse, elle hurle dans le vide. Elle a perdu la scène. Et moi, je suis devenu son obstacle. L’homme à abattre. L'ennemi du récital.
Heureusement, on a réparé la porte du Parloir. Celle que Jeanninou a pulvérisée de sa charge mystique l’autre soir. Ils l’ont remise en état, solide, renforcée, sans doute blindée de regrets administratifs. Les hurlements de la Chanteuse ne nous parviennent plus que comme un souffle brisé, un écho lointain, presque supportable. Tant que la porte tient.
Et pendant qu’elle rugit dans son opéra personnel, aMi ami Dolphins, lui, continue son propre cirque. Malgré des doses de calmants qui assommeraient un cheval de guerre, il trouve encore l’énergie d’enlever son pantalon et de courir nu dans les couloirs en criant qu’il se fout du Parloir. Que ça ne l’intéresse pas. Que ça ne veut rien dire. Que c’est surfait. Et à chaque coin de mur, il le répète. Plus il parle de son désintérêt, plus il en fait des tonnes. Même les malades mentaux, pourtant pas bien calibrés pour la logique, commencent à le regarder de travers. L’un d’eux, un vieil hébété qui passe ses journées à lécher les murs, a murmuré hier : "Mais pourquoi il en parle autant, alors s'il s'en fout ?" Je dois admettre que cette question m’a traversé l’esprit aussi. Discrètement. Fugacement. Comme une vérité qui glisse avant de mordre.
Cet après-midi, on nous a proposé un Atelier Dessin. Une respiration, ont-ils dit. Une façon d’extérioriser les émotions par l’image. Le thème : "Dessinez un personnage qui vous fait du bien. Quelqu’un dont vous aimez ce qu’il représente." J’ai pris un crayon. Un vrai. Autorisé pour une fois. Et j’ai dessiné un homme. Un acteur. Mort depuis longtemps. Mais dont la voix, les grimaces, la malice continuent à me tenir chaud les jours de grand vide. Un souvenir d’enfance. De rire. De partage. Quelqu’un que même le Centre ne pourra pas effacer.
(On m’a autorisé à garder une copie de ce dessin. Je la glisserai juste après cette page, pour partager cette inspiration et rendre un dernier hommage à feue Gribouilleuse, que d’aucuns pensent réduite aux oubliettes. )
JOUR 19 – Bloc C, Cellule 21
On nous a envoyé aujourd’hui une femme sans âge. Ou plutôt sans époque. Une sorte de momie habillée en humaniste, la peau tendue comme du parchemin humide, les yeux clairs mais vides, et la voix... la voix. Une voix comme un tiroir qui coince, pleine de mots mal empilés. Elle s’appelle NoirJacques. Oui. Noir. Jacques. Personne ici ne comprend. Ni le nom. Ni la fonction. Ni la logique. Rien.
Elle circule entre les cellules comme une mauvaise odeur institutionnelle. Elle s’invite dans les conversations, qu’elle coupe net comme un sabre mou. Elle écoute, mais ne répond jamais de façon claire. Elle parle, mais on ne sait jamais vraiment si c’est à nous, à elle-même, ou à un monde parallèle dans lequel les mots n’auraient plus aucun sens.
Et ce nom, ce nom, mon dieu… Jacques. Pourquoi Jacques ? Pourquoi pas Paulette, Monique, ou Ginette, des noms de femme, classiques, honnêtes ? Non. Jacques. Probablement un reste de testostérone mal recyclée, une dérive hormonale post-ménopause. Elle a la moustache fine, le duvet dru, la mâchoire légèrement fuyante, comme si son corps tout entier avait décidé de glisser vers le masculin sans prévenir. Et soyons honnêtes : avec sa barbe de trois jours et sa moustache naissante au dessus des lèvres, elle porte mieux Jacques que Simone.
Mais le pire, ce n’est pas ce qu’elle est. C’est ce qu’elle dit. Ou plutôt ce qu’elle tente de dire. Elle tente des calembours sans inspiration, faits de syllabes usées, un gloubiboulga syntaxique où les jeux de mots mal ficelés côtoient les aphorismes creux comme des coquilles de noix.
À la promenade, on nous en libère. Elle reste à l’intérieur, Dieu merci. Et là, dans la cour, les langues se délient. Les regards se croisent. Tous s’interrogent. Même les plus amorphes. Même ceux qui d’ordinaire préfèrent parler aux pigeons imaginaires.
“Mais c'est qui celle là ?”
“Pourquoi on nous l’inflige ?”
“Qu’avons-nous fait pour mériter ça ?”
Des questions simples. Des supplications muettes. Comme si l’arrivée de NoirJacques était une punition collective infligée pour un crime qu’on ignore encore avoir commis.
Au retour de promenade, l’annonce tombe : nouvel atelier. Une affiche sortie de nulle part, punaisée à la porte du réfectoire, au papier jauni comme une injonction venue d’un autre siècle :
“Atelier de régénération morale par l’expression symbolique de la gratitude implicite.”
Une ligne droite vers la folie.
Et au centre de la salle, trônant derrière une table comme un oracle flétri : NoirJacques elle-même. Voilà donc ce qu’elle faisait ici. Pas une punition. Pas une erreur administrative. Non. Une nomination. NoirJacques est officiellement animatrice carcérale.
Une décision validée, probablement, par un comité d’évaluation sous Tranxène. Elle porte un badge, griffonné à la main : “Intervenante externe – Agrément 41B”. Ce monde est foutu
Elle nous attend, assise droite comme un clou, les mains posées sur une boîte à fiches colorées, devant un tableau blanc où sont écrits en lettres tremblées :
“Dire merci, c’est s’offrir un avenir.”
Elle commence d’une voix lente, posée, comme si chaque mot lui coûtait un poumon :
— “Dans l’abîme de l’offense, on peut encore pêcher une perle : la reconnaissance.”
Elle nous distribue des feuilles. Dessus, des situations : humiliation, rejet, trahison.
À nous d’y répondre par une phrase de remerciement. Un pardon fabriqué. Une offrande forcée.
Elle s’arrête à ma hauteur, me fixe, et dit, avec ce sourire pincé qu’on réserve aux enterrements mondains :
— “Schaltzmann… Vous êtes toujours prompt à faire monter la mayonnaise. Mais gare à la vinaigrette qui tourne…”
Je ne réponds rien. De toute façon je ne comprends pas. J’aurais préféré que ce soit elle qui tourne.
Elle se déplace vers Youri.
— “Monsieur Youri… Si je vous oublie, que direz-vous ?”
Youri regarde autour de lui. Il respire un coup.
— “Je dirai merci. Merci d’avoir prouvé que l’oubli, parfois, est un cadeau.”
NoirJacques hoche la tête.
— “Ah… Une ironie noble. Comme un pet dans une messe. Mais prenez garde le P est toujours sous le Q ... ”
Personne ne rit.
Même Youri reste bouche fermée. Par prudence, ou par lassitude.
On a dû déposer nos feuilles dans une boîte estampillée “Offrandes mentales”. NoirJacques a noté nos noms sur un registre en cuir synthétique, avec une lenteur de notaire.
Et alors qu’on commençait à se lever, elle a levé la main, solennelle, comme si elle livrait une vérité ancienne :
— “Certains prennent un Médoc pour se calmer… moi, je le bois pour mieux pardonner.”
Je vous le dis, cette femme est incompréhensible !!
À la sortie, Youri m’a glissé :
— “Encore deux ateliers comme ça et j’me fais brider les yeux et j’demande mon transfert chez les Japonais.”
Il plaisante pour tenir le coup. C’est sa carapace. Moi, j’ai arrêté de plaisanter. Je m’affûte. Puisque de toute manière, ils ne comprennent rien.
Votre très dévoué, et toujours irrévérencieux,
Schaltzmann.
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- Inscription : lun. mai 14, 2018 9:45 pm
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
ah enfin blanjean dans l'histoire 
bravo Scheissemann

bravo Scheissemann

Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Le roulement de tambour...de la vedette
C'est bien ce que je pensais, est au bout ... "Schlass" man
C'est bien ce que je pensais, est au bout ... "Schlass" man
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- Inscription : mer. févr. 19, 2025 1:44 pm
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Bon.. pour la diarrhée verbale : Imodium 2 mg - 2 gélules par jour
Après chaque selle non moulée, prendre 1 gélule supplémentaire, sans dépasser 8 gélules par jour !
Pour le dessin, c'est bien mais peut mieux faire ^^
C'est pas vraiment Louis de Finesse...
Plutôt Louis de Funès avant Comme j'aime
Persévère !
Ton amie Lara Turelle
Après chaque selle non moulée, prendre 1 gélule supplémentaire, sans dépasser 8 gélules par jour !
Pour le dessin, c'est bien mais peut mieux faire ^^
C'est pas vraiment Louis de Finesse...
Plutôt Louis de Funès avant Comme j'aime

Persévère !
Ton amie Lara Turelle
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- Inscription : lun. mai 14, 2018 9:45 pm
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- Inscription : ven. avr. 18, 2014 6:09 pm
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Avec l'Imodium peut être rajouter 50 gouttes de Tercian ça devient urgent je pense 

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- Inscription : mar. mars 01, 2011 10:31 am
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
lol Bonbonnière .ses commentaires devrait etre supprimés
morte de rire
morte de rire
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
talisette, ce sont toutes vos accusations diffamatoires envers une modératrice, qui devraient être supprimées.
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- Inscription : ven. avr. 18, 2014 6:09 pm
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Bien que je ne cautionne pas pour les modés, les autres joueurs on s'en fout? des jours que certains sont pris pour cible sur la faq
Quand a la diffamation je crois que tatalisette a eu son lot de propos plus que douteux ( folle, alcoolo etc) Mais ça aussi c'est pas grave
Quand a la diffamation je crois que tatalisette a eu son lot de propos plus que douteux ( folle, alcoolo etc) Mais ça aussi c'est pas grave
-
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- Inscription : dim. oct. 24, 2021 4:46 pm
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Salut coeurensucre
Quelle prose, quel talent, je suis jaloux.
Au milieu de centaines d’écrits anonymes, on reconnaîtrait facilement ton style. Cette manière de se foutre de la gueule des gens, en prenant bien soin de tenir des propos qui rabaissent, qui dévalorisent, qui dénigrent, c’est bien toi.
Et tu as besoin de ça pour te sentir grand et fort. Je suis sincèrement heureux pour toi que tu te sentes bien (que veux-tu, les ravages de mon éducation humaniste).
Je tiens vraiment à te remercier d’avoir pensé à mettre un petit mot en mon honneur. Précédé par d’autres pseudos, j’ai dû attendre la page 5 pour que tu parles de moi. J’aurais été déçu qu’un si grand homme m’oublie.
Mais je déraille… un grand homme? Mais non, bien mieux, une vedette, que dis-je, une star.
Et comme toute star, tu as tes groupies… oh moins d’une vingtaine (dont 3 du service d’ordre), et quelques autres au Bloc 1, tu sais... ce Bloc où errent des centaines de pseudos en décomposition.
Je vais me répéter, je suis vraiment jaloux. En tant que quérulent, j’envie ton savoir, car en matière de psychiatrie tu dois en connaître un rayon…
Oups je suis désolé, je ne voulais pas prendre trop d’espace sur ton sujet, c’est toi la star hein.
Alors pour finir…
- deux précisions: je ne vais que chez Leclerc et Monoprix. Et aux petits beurres, je préfère les galettes St Michel et les Chamonix orange (mais j’attends les promos pour en acheter).
- une question: à priori, c’est toi qui quittes le parloir en dernier. Alors, qui fait le nettoyage? Le monsieur avec sa brosse à reluire?
- une pensée: comme le disait une grande philosophe que j’aimais bien (j’ai oublié son nom): "tout ceci n’est que du virtuel, bon sang c’est de l’humour, du 6ème degré".
Respectueusement
JeVeuxUnBounty

Quelle prose, quel talent, je suis jaloux.
Au milieu de centaines d’écrits anonymes, on reconnaîtrait facilement ton style. Cette manière de se foutre de la gueule des gens, en prenant bien soin de tenir des propos qui rabaissent, qui dévalorisent, qui dénigrent, c’est bien toi.
Et tu as besoin de ça pour te sentir grand et fort. Je suis sincèrement heureux pour toi que tu te sentes bien (que veux-tu, les ravages de mon éducation humaniste).
Je tiens vraiment à te remercier d’avoir pensé à mettre un petit mot en mon honneur. Précédé par d’autres pseudos, j’ai dû attendre la page 5 pour que tu parles de moi. J’aurais été déçu qu’un si grand homme m’oublie.
Mais je déraille… un grand homme? Mais non, bien mieux, une vedette, que dis-je, une star.
Et comme toute star, tu as tes groupies… oh moins d’une vingtaine (dont 3 du service d’ordre), et quelques autres au Bloc 1, tu sais... ce Bloc où errent des centaines de pseudos en décomposition.
Je vais me répéter, je suis vraiment jaloux. En tant que quérulent, j’envie ton savoir, car en matière de psychiatrie tu dois en connaître un rayon…
Oups je suis désolé, je ne voulais pas prendre trop d’espace sur ton sujet, c’est toi la star hein.
Alors pour finir…
- deux précisions: je ne vais que chez Leclerc et Monoprix. Et aux petits beurres, je préfère les galettes St Michel et les Chamonix orange (mais j’attends les promos pour en acheter).
- une question: à priori, c’est toi qui quittes le parloir en dernier. Alors, qui fait le nettoyage? Le monsieur avec sa brosse à reluire?
- une pensée: comme le disait une grande philosophe que j’aimais bien (j’ai oublié son nom): "tout ceci n’est que du virtuel, bon sang c’est de l’humour, du 6ème degré".
Respectueusement
JeVeuxUnBounty
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- Inscription : lun. oct. 02, 2006 8:16 pm
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
Ce récit est une histoire, une fiction. Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d'une pure coïncidence.
JOUR 20 – Bloc C, Cellule 21
Le réveil a été brutal. Pas à cause de la sirène - elle fait partie du décor maintenant - mais à cause du dos. Cette douleur qui s’incruste dans la colonne comme une vieille aiguille oubliée. Le sommier en béton me laboure les omoplates, et le matelas en mousse, trop fin, trop mou, trop hygiénique, ne sert à rien d’autre qu’à me rappeler que le confort est ici une faveur conditionnelle.
Je me suis redressé lentement, chaque vertèbre grinçant comme un loquet mal huilé. Dans le coin, quelques cafards traînaient encore, rescapés de l'opération de désinfection qu’on nous a imposée la semaine dernière - un genre de croisade chimique à base de vapeurs vinaigrées et de promesses de pureté carcérale. Raté. Les cafards reviennent toujours. Comme les idées. Comme la colère. Ils sortent quand le poison retombe.
Je les ai regardés un instant. Ni haine, ni peur. Juste cette vieille reconnaissance muette qu’on se porte entre survivants. L’un grimpa le long de la cuvette, un autre disparut dans une fissure sous le lavabo. Invisibles à nouveau. Comme moi, parfois.
Je me suis levé. Doucement. Rangement du drap, toilette rapide, même geste, même tempo. Routine de détention. Puis la porte s’est ouverte, comme chaque matin, avec ce petit bruit de destin rouillé.
En me dirigeant vers la salle commune pour le petit-déjeuner, quelque chose me saute aux yeux. Sur les murs gris trop propres, juste avant le couloir de droite, entre deux affichettes sur l’effacement conscient de soi et la joie de la parole réparatrice, se trouvent… mes mots. Des pages entières. Mes pages. Mon journal. Mon carnet. Affichées, punaisées, plastifiées. Pas un extrait. Non. De longs blocs, entiers, reproduits noir sur blanc. Signés de mon nom. Avec un petit titre au-dessus : “Exemple de narration à déconstruire.” Un gardien. Forcément. L’un d’eux a fouillé, ou trouvé mon carnet là où je pensais le cacher. Et plutôt que me dénoncer, il l’a livré en pâture. Aux autres. Ce n’est pas si grave. Après tout, tout ça est destiné à sortir un jour, à vivre au-delà de ces murs. Mais la méthode… la mise en scène… elle a ce goût de provocation douce. Sournoise. Une sentence sans gifle, un bûcher sans flammes.
À peine ma bouillie avalée - une sorte de tapioca marron qui hésite entre le soja rance et le lait caillé visqueux - on me glisse à l’oreille :
— « Après le petit-déjeuner, rendez-vous au Bloc 1. Salle 8. »
Je hoche la tête. Pas un mot. J’ai appris. Moins on parle, plus on entend. Pendant que je mastique ma punition tiède, les hypothèses tournent. Le Bloc 1 ? La salle 8 ? Une cellule de discipline ? Un atelier de repentance ? Ou pire : un conseil citoyen.
Le trajet jusqu’au Bloc 1, je le fais escorté. Une silhouette grise, armée d'une matraque mais à l’attitude bienveillante. Le long des murs, les regards se baissent. Je croise un patient camisolé, encadré par deux infirmiers. Il ne parle pas. Il ne lutte pas. Ils l’emmènent vers la cellule capitonnée. Trop agité. Trop humain. Ici, c’est l’homme qu’on isole, pas la folie.
On avance dans un couloir froid et silencieux, on tourne à droite, on descend une volée de marches où le néon tremble comme un cœur mal branché, et on arrive : Salle 8. La porte s’ouvre. Et là, je comprends.
Ils sont là. Alignés comme des jurés d’opérette. La Gribouilleuse, les cheveux gras en pétard, assise sur une chaise d’enfant qu’elle a elle-même repeinte en rouge névrotique. Son carnet est sur ses genoux. Elle griffonne sans cesse. Des cercles. Des spirales. Des profils vengeurs. Elle relève à peine les yeux. Mais je sais qu’elle me voit. À sa droite, aMi ami Dolphins, torse nu malgré le règlement, les doigts qui grattent frénétiquement ses côtes, le pantalon à moitié baissé. Il râle à voix basse :
— « Cet uniforme me brûle la peau. Il ment sur ma nature. Ma peau respire la vérité. Laissez-moi nu. C’est ça, l’authenticité. »
Dans un coin, déjà installé comme un avocat de série B, se tient Jamespaslestwix, crayon à la main, calepin ouvert, chaque page numérotée, datée. Il lève à peine le nez. Mais je l’entends murmurer :
— « Ceci sera consigné. Absolument tout. Même la couleur de tes chaussures. »
Et puis… elle. Je ne l’avais pas reconnue au début mais je la connaissais, de loin. Une silhouette bancale. Un œil à moitié fermé. L’autre qui me transperce. Elle se lève.
— « Je suis GrosseMama48 ! »
Sa voix est pleine de feu et de phlegme. Elle tremble d’une conviction molle.
— « Tu ne m’as jamais rien dit d’offensant. Tu m’as même toujours saluée. Respectée. Mais ton comportement est haïssable ! Tu nourris la folie des faibles ! Tu souffles sur les braises des déséquilibres ! Tu es un incendiaire du sensible ! »
Elle lève les bras comme une prêtresse oubliée.
— « Je suis la Justice, tu m’entends ?? Je suis LA JUSTICE !! »
Et soudain, son corps se tord. Ses yeux roulent. Elle s’effondre. Une crise. L’écume aux lèvres. Des spasmes. Des ongles qui griffent l’air. Deux infirmiers surgissent. Injectent. Portent. S’éloignent. Le silence. Une de moins. C’est déjà ça.
Je suis resté debout. Ils étaient assis, eux. Bien confortables dans leur indignation. Une tablette unique avait été posée sur la table, comme un témoin dans un procès sans juge. Ils devaient l’utiliser à tour de rôle pour y écrire ce que mes pages leur avaient “fait ressentir”. Le mot exact : ressentir. Pas comprendre. Pas réfléchir. Ressentir.
Oui, mes pages, celles punaisées aux murs de tous les blocs. Celles que toute la Centrale a pu lire. Celles qui, pour la première fois, leur ont tendu un miroir sans filtre, sans politesse. On m’a convoqué ici pour ça : pour qu’ils puissent s’indigner, officiellement, rituellement. Pour les laisser recracher, face à moi, ce que mes mots leur ont fait - ou plutôt, ce qu’ils n’ont pas supporté d’y reconnaître.
La Gribouilleuse s’en est saisie la première, avec ses mains de militante en panne d’inspiration. Son visage était fermé, pincé, concentré. Elle écrivait comme si elle devait valider son existence. Elle a tapé vite, sans relire, puis a reposé la tablette d’un geste sec.
Dolphins s’est jeté dessus comme sur une console de jeu. Il a pianoté en ricanant, les yeux brillants de malice trouble. C’était expédié en dix secondes. Aucune hésitation. Trois pressions de doigts. Peut-être même pas un mot entier.
Jamespaslestwix, enfin, a pris l’objet avec une lenteur quasi cérémonieuse. Il s’est redressé, a nettoyé l’écran avec une manche, s’est calé contre le dossier comme s’il allait rédiger un signalement disciplinaire. Son front s’est plissé, ses doigts ont hésité, puis se sont mis à frapper avec une régularité presque méticuleuse. Il a mis du temps. Plus que les deux autres réunis. Comme si la procédure, même ici, exigeait sa part de solennité.
Quand ils ont eu terminé, la tablette m’a été glissée entre les mains, tiède encore des doigts qui y avaient tapé leur bile. Une synthèse de frustrations sous calmants.
Je lis, je n'esquisse aucune réaction, pas un sourire, pas un froncement de sourcil, je reste de marbre, je fais juste semblant de m’intéresser. Et quand je repose la tablette sur la table, un animateur les encourage tout de même à expliquer leur réaction de vive voix : était-ce de la méchanceté ? du second degré ? une galéjade ? Et là, tombent les explications.
La Gribouilleuse, d’abord :
— « L’Imodium, c’était une image, Schaltzmann. Une métaphore laxative. Faut apprendre à rire un peu. Et puis ton dessin, franchement… ton Louis de Funès ? Plutôt une version inclusive et bien nourrie. »
Elle a ri. Ce rire hystérique, tordu de méchanceté, fendu par la folie, celui d’une âme en transe, convaincue qu’un calembour peut devenir révolution. Elle continuait inlassablement à tracer ses petits chapeaux dans l’air, du bout de ses doigts noueux, comme si ces accents muets pouvaient dire ce qu’elle n’osait plus formuler.
Ensuite, aMi ami Dolphins. Il s’était allongé par terre, entièrement nu désormais, grattant son aine avec frénésie, comme s’il cherchait un trésor enfoui dans sa démangeaison.
— « J’ai mis trois smileys… trois ! Des rigolos jaunes ! C’est des gentils, pas des méchants ! Et toi tu fais le gros monsieur qui crie, tu dis que j’suis vilain. Mais non ! Moi j’suis pas vilain, j’suis rigolo dans l’eau, je nage dans les bulles. T’écris avec des mots cassants, toi, des mots qui font peur aux gens normaux qui pensent comme moi. Pas bien, pas doux. Moi j’suis doux. J’suis toi mais en dauphin. Un dauphin gentil qui rit avec sa bouche. »
Il a tenté un salto arrière, a raté, s’est assommé à moitié sur le carrelage. L’infirmier, stoïque, a noté : “Comportement en régression.”
Puis est venu le tour de Jamespaslestwix. Il a descendu ses lunettes sur le bout de son nez, croisé ses bras, levé les yeux comme un juge fatigué :
— « Tu veux tout écrire. Très bien. Moi aussi. Mais moi, je fais des signalements, je fais des lettres, des mails. Je chiffre. Je dépose. Je contre-attaque. Je stocke la mémoire institutionnelle. Toi, tu écris pour qu’on t’admire. Moi, j’écris pour qu’on te supprime. »
Il a souri. Ce sourire d’homme qui pense encore qu’un formulaire peut renverser un Roi.
Et moi… je les ai regardés. Longuement. Sans haine. Sans colère. Presque avec une tendresse glacée.
— « Vous vous agitez tous autour d’un journal intime. Un carnet. Mon carnet. Vous croyez que chaque mot est une invitation. Une provocation. Une offense. Mais ce que vous ne comprenez pas, c’est que vous n’y avez jamais été invités. Vous vous y êtes incrustés. Vous êtes comme des mômes qui regardent par le trou de la serrure et qui hurlent à la diffamation dès qu’ils voient quelque chose qui les dérange. Ce journal n’attend rien de vous. Aucune réponse. Aucune approbation. J’écris simplement pour rester en vie. C’est tout. Une pulsation. Une ligne de flottaison. Pas un débat. »
aMi ami Dolphins s’est redressé.
— « Parce qu’on est vivants, mon gars ! Tu crois qu’on va rester dans ton journal sans y répondre ? On existe, tu nous as créés ! »
Je l’ai fixé.
— « Non. Je ne vous ai pas créés. Vous existiez déjà. Moi, je vous ai juste… caricaturés. À l’encre. Et vous n’avez pas supporté votre juste reflet. »
La Gribouilleuse a recommencé à dessiner. Des petits cercueils. Des visages déformés. Peut-être le sien. Peut-être le mien.
Jamespaslestwix, toujours droit :
— « Donc tu veux le conflit. Tu veux l’affichage. Très bien. Mais attends-toi à des conséquences. »
Je me suis tourné vers lui.
— « L’affichage, c’est moi qui vais m’en occuper. Dorénavant, à chaque fois, je collerai moi-même mes pages sur les murs. Pour que tous lisent. Pour que chacun se reconnaisse. Parce que ce que vous ne supportez pas, ce n’est pas ce que j’écris. C’est que je le fasse… sans vous demander la permission. »
On m’a raccompagné en silence. Pas un mot. Pas un cri. Et en chemin, j’ai souri. Pas pour eux. Pour moi. Parce qu’au fond, je leur rends service. En me haïssant, ils tiennent debout. En me prenant pour leur bourreau, ils s’évitent d’affronter le vrai supplice : eux-mêmes. Je suis leur mur d’entraînement, leur croquemitaine utile, leur gifle régulatrice. Je suis la friction qui les empêche de se dissoudre.
Je suis leur antidote, administré par erreur, toléré à défaut. Leur poison utile. Leur électrochoc. Le miroir qu’ils détestent mais qu’ils ne peuvent pas quitter des yeux. Ils croient que je les attaque. La vérité, c’est que je les soigne. Brutalement. Involontairement. Sans blouse ni diplôme. Mais je les soigne. Parce que plus ils s’agitent, plus je leur tends ce reflet qu’ils refusent de nommer. Et un jour, peut-être, à force d’avoir hurlé contre moi, ils entendront enfin ce que leurs cris révèlent. Et comprendront que ce n’est pas moi qui les ridiculise.
- C’est eux.
Votre très dévoué, et désormais thérapeutique,
Schaltzmann
JOUR 20 – Bloc C, Cellule 21
Le réveil a été brutal. Pas à cause de la sirène - elle fait partie du décor maintenant - mais à cause du dos. Cette douleur qui s’incruste dans la colonne comme une vieille aiguille oubliée. Le sommier en béton me laboure les omoplates, et le matelas en mousse, trop fin, trop mou, trop hygiénique, ne sert à rien d’autre qu’à me rappeler que le confort est ici une faveur conditionnelle.
Je me suis redressé lentement, chaque vertèbre grinçant comme un loquet mal huilé. Dans le coin, quelques cafards traînaient encore, rescapés de l'opération de désinfection qu’on nous a imposée la semaine dernière - un genre de croisade chimique à base de vapeurs vinaigrées et de promesses de pureté carcérale. Raté. Les cafards reviennent toujours. Comme les idées. Comme la colère. Ils sortent quand le poison retombe.
Je les ai regardés un instant. Ni haine, ni peur. Juste cette vieille reconnaissance muette qu’on se porte entre survivants. L’un grimpa le long de la cuvette, un autre disparut dans une fissure sous le lavabo. Invisibles à nouveau. Comme moi, parfois.
Je me suis levé. Doucement. Rangement du drap, toilette rapide, même geste, même tempo. Routine de détention. Puis la porte s’est ouverte, comme chaque matin, avec ce petit bruit de destin rouillé.
En me dirigeant vers la salle commune pour le petit-déjeuner, quelque chose me saute aux yeux. Sur les murs gris trop propres, juste avant le couloir de droite, entre deux affichettes sur l’effacement conscient de soi et la joie de la parole réparatrice, se trouvent… mes mots. Des pages entières. Mes pages. Mon journal. Mon carnet. Affichées, punaisées, plastifiées. Pas un extrait. Non. De longs blocs, entiers, reproduits noir sur blanc. Signés de mon nom. Avec un petit titre au-dessus : “Exemple de narration à déconstruire.” Un gardien. Forcément. L’un d’eux a fouillé, ou trouvé mon carnet là où je pensais le cacher. Et plutôt que me dénoncer, il l’a livré en pâture. Aux autres. Ce n’est pas si grave. Après tout, tout ça est destiné à sortir un jour, à vivre au-delà de ces murs. Mais la méthode… la mise en scène… elle a ce goût de provocation douce. Sournoise. Une sentence sans gifle, un bûcher sans flammes.
À peine ma bouillie avalée - une sorte de tapioca marron qui hésite entre le soja rance et le lait caillé visqueux - on me glisse à l’oreille :
— « Après le petit-déjeuner, rendez-vous au Bloc 1. Salle 8. »
Je hoche la tête. Pas un mot. J’ai appris. Moins on parle, plus on entend. Pendant que je mastique ma punition tiède, les hypothèses tournent. Le Bloc 1 ? La salle 8 ? Une cellule de discipline ? Un atelier de repentance ? Ou pire : un conseil citoyen.
Le trajet jusqu’au Bloc 1, je le fais escorté. Une silhouette grise, armée d'une matraque mais à l’attitude bienveillante. Le long des murs, les regards se baissent. Je croise un patient camisolé, encadré par deux infirmiers. Il ne parle pas. Il ne lutte pas. Ils l’emmènent vers la cellule capitonnée. Trop agité. Trop humain. Ici, c’est l’homme qu’on isole, pas la folie.
On avance dans un couloir froid et silencieux, on tourne à droite, on descend une volée de marches où le néon tremble comme un cœur mal branché, et on arrive : Salle 8. La porte s’ouvre. Et là, je comprends.
Ils sont là. Alignés comme des jurés d’opérette. La Gribouilleuse, les cheveux gras en pétard, assise sur une chaise d’enfant qu’elle a elle-même repeinte en rouge névrotique. Son carnet est sur ses genoux. Elle griffonne sans cesse. Des cercles. Des spirales. Des profils vengeurs. Elle relève à peine les yeux. Mais je sais qu’elle me voit. À sa droite, aMi ami Dolphins, torse nu malgré le règlement, les doigts qui grattent frénétiquement ses côtes, le pantalon à moitié baissé. Il râle à voix basse :
— « Cet uniforme me brûle la peau. Il ment sur ma nature. Ma peau respire la vérité. Laissez-moi nu. C’est ça, l’authenticité. »
Dans un coin, déjà installé comme un avocat de série B, se tient Jamespaslestwix, crayon à la main, calepin ouvert, chaque page numérotée, datée. Il lève à peine le nez. Mais je l’entends murmurer :
— « Ceci sera consigné. Absolument tout. Même la couleur de tes chaussures. »
Et puis… elle. Je ne l’avais pas reconnue au début mais je la connaissais, de loin. Une silhouette bancale. Un œil à moitié fermé. L’autre qui me transperce. Elle se lève.
— « Je suis GrosseMama48 ! »
Sa voix est pleine de feu et de phlegme. Elle tremble d’une conviction molle.
— « Tu ne m’as jamais rien dit d’offensant. Tu m’as même toujours saluée. Respectée. Mais ton comportement est haïssable ! Tu nourris la folie des faibles ! Tu souffles sur les braises des déséquilibres ! Tu es un incendiaire du sensible ! »
Elle lève les bras comme une prêtresse oubliée.
— « Je suis la Justice, tu m’entends ?? Je suis LA JUSTICE !! »
Et soudain, son corps se tord. Ses yeux roulent. Elle s’effondre. Une crise. L’écume aux lèvres. Des spasmes. Des ongles qui griffent l’air. Deux infirmiers surgissent. Injectent. Portent. S’éloignent. Le silence. Une de moins. C’est déjà ça.
Je suis resté debout. Ils étaient assis, eux. Bien confortables dans leur indignation. Une tablette unique avait été posée sur la table, comme un témoin dans un procès sans juge. Ils devaient l’utiliser à tour de rôle pour y écrire ce que mes pages leur avaient “fait ressentir”. Le mot exact : ressentir. Pas comprendre. Pas réfléchir. Ressentir.
Oui, mes pages, celles punaisées aux murs de tous les blocs. Celles que toute la Centrale a pu lire. Celles qui, pour la première fois, leur ont tendu un miroir sans filtre, sans politesse. On m’a convoqué ici pour ça : pour qu’ils puissent s’indigner, officiellement, rituellement. Pour les laisser recracher, face à moi, ce que mes mots leur ont fait - ou plutôt, ce qu’ils n’ont pas supporté d’y reconnaître.
La Gribouilleuse s’en est saisie la première, avec ses mains de militante en panne d’inspiration. Son visage était fermé, pincé, concentré. Elle écrivait comme si elle devait valider son existence. Elle a tapé vite, sans relire, puis a reposé la tablette d’un geste sec.
Dolphins s’est jeté dessus comme sur une console de jeu. Il a pianoté en ricanant, les yeux brillants de malice trouble. C’était expédié en dix secondes. Aucune hésitation. Trois pressions de doigts. Peut-être même pas un mot entier.
Jamespaslestwix, enfin, a pris l’objet avec une lenteur quasi cérémonieuse. Il s’est redressé, a nettoyé l’écran avec une manche, s’est calé contre le dossier comme s’il allait rédiger un signalement disciplinaire. Son front s’est plissé, ses doigts ont hésité, puis se sont mis à frapper avec une régularité presque méticuleuse. Il a mis du temps. Plus que les deux autres réunis. Comme si la procédure, même ici, exigeait sa part de solennité.
Quand ils ont eu terminé, la tablette m’a été glissée entre les mains, tiède encore des doigts qui y avaient tapé leur bile. Une synthèse de frustrations sous calmants.
Je lis, je n'esquisse aucune réaction, pas un sourire, pas un froncement de sourcil, je reste de marbre, je fais juste semblant de m’intéresser. Et quand je repose la tablette sur la table, un animateur les encourage tout de même à expliquer leur réaction de vive voix : était-ce de la méchanceté ? du second degré ? une galéjade ? Et là, tombent les explications.
La Gribouilleuse, d’abord :
— « L’Imodium, c’était une image, Schaltzmann. Une métaphore laxative. Faut apprendre à rire un peu. Et puis ton dessin, franchement… ton Louis de Funès ? Plutôt une version inclusive et bien nourrie. »
Elle a ri. Ce rire hystérique, tordu de méchanceté, fendu par la folie, celui d’une âme en transe, convaincue qu’un calembour peut devenir révolution. Elle continuait inlassablement à tracer ses petits chapeaux dans l’air, du bout de ses doigts noueux, comme si ces accents muets pouvaient dire ce qu’elle n’osait plus formuler.
Ensuite, aMi ami Dolphins. Il s’était allongé par terre, entièrement nu désormais, grattant son aine avec frénésie, comme s’il cherchait un trésor enfoui dans sa démangeaison.
— « J’ai mis trois smileys… trois ! Des rigolos jaunes ! C’est des gentils, pas des méchants ! Et toi tu fais le gros monsieur qui crie, tu dis que j’suis vilain. Mais non ! Moi j’suis pas vilain, j’suis rigolo dans l’eau, je nage dans les bulles. T’écris avec des mots cassants, toi, des mots qui font peur aux gens normaux qui pensent comme moi. Pas bien, pas doux. Moi j’suis doux. J’suis toi mais en dauphin. Un dauphin gentil qui rit avec sa bouche. »
Il a tenté un salto arrière, a raté, s’est assommé à moitié sur le carrelage. L’infirmier, stoïque, a noté : “Comportement en régression.”
Puis est venu le tour de Jamespaslestwix. Il a descendu ses lunettes sur le bout de son nez, croisé ses bras, levé les yeux comme un juge fatigué :
— « Tu veux tout écrire. Très bien. Moi aussi. Mais moi, je fais des signalements, je fais des lettres, des mails. Je chiffre. Je dépose. Je contre-attaque. Je stocke la mémoire institutionnelle. Toi, tu écris pour qu’on t’admire. Moi, j’écris pour qu’on te supprime. »
Il a souri. Ce sourire d’homme qui pense encore qu’un formulaire peut renverser un Roi.
Et moi… je les ai regardés. Longuement. Sans haine. Sans colère. Presque avec une tendresse glacée.
— « Vous vous agitez tous autour d’un journal intime. Un carnet. Mon carnet. Vous croyez que chaque mot est une invitation. Une provocation. Une offense. Mais ce que vous ne comprenez pas, c’est que vous n’y avez jamais été invités. Vous vous y êtes incrustés. Vous êtes comme des mômes qui regardent par le trou de la serrure et qui hurlent à la diffamation dès qu’ils voient quelque chose qui les dérange. Ce journal n’attend rien de vous. Aucune réponse. Aucune approbation. J’écris simplement pour rester en vie. C’est tout. Une pulsation. Une ligne de flottaison. Pas un débat. »
aMi ami Dolphins s’est redressé.
— « Parce qu’on est vivants, mon gars ! Tu crois qu’on va rester dans ton journal sans y répondre ? On existe, tu nous as créés ! »
Je l’ai fixé.
— « Non. Je ne vous ai pas créés. Vous existiez déjà. Moi, je vous ai juste… caricaturés. À l’encre. Et vous n’avez pas supporté votre juste reflet. »
La Gribouilleuse a recommencé à dessiner. Des petits cercueils. Des visages déformés. Peut-être le sien. Peut-être le mien.
Jamespaslestwix, toujours droit :
— « Donc tu veux le conflit. Tu veux l’affichage. Très bien. Mais attends-toi à des conséquences. »
Je me suis tourné vers lui.
— « L’affichage, c’est moi qui vais m’en occuper. Dorénavant, à chaque fois, je collerai moi-même mes pages sur les murs. Pour que tous lisent. Pour que chacun se reconnaisse. Parce que ce que vous ne supportez pas, ce n’est pas ce que j’écris. C’est que je le fasse… sans vous demander la permission. »
On m’a raccompagné en silence. Pas un mot. Pas un cri. Et en chemin, j’ai souri. Pas pour eux. Pour moi. Parce qu’au fond, je leur rends service. En me haïssant, ils tiennent debout. En me prenant pour leur bourreau, ils s’évitent d’affronter le vrai supplice : eux-mêmes. Je suis leur mur d’entraînement, leur croquemitaine utile, leur gifle régulatrice. Je suis la friction qui les empêche de se dissoudre.
Je suis leur antidote, administré par erreur, toléré à défaut. Leur poison utile. Leur électrochoc. Le miroir qu’ils détestent mais qu’ils ne peuvent pas quitter des yeux. Ils croient que je les attaque. La vérité, c’est que je les soigne. Brutalement. Involontairement. Sans blouse ni diplôme. Mais je les soigne. Parce que plus ils s’agitent, plus je leur tends ce reflet qu’ils refusent de nommer. Et un jour, peut-être, à force d’avoir hurlé contre moi, ils entendront enfin ce que leurs cris révèlent. Et comprendront que ce n’est pas moi qui les ridiculise.
- C’est eux.
Votre très dévoué, et désormais thérapeutique,
Schaltzmann
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- Messages : 176
- Inscription : mar. mars 01, 2011 10:31 am
Re: Nouveau Journal d'un prisonnier politique.
bonjour ici .qui va calmer ce malade.? marre des discussions a deux balles. que personne ne lis on passe